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L’intervisibilité : application à la région de la Tolfa-Allumiere

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“L’INTERVISIBILITÉ”:

APPLICATION À LA RÉGION DE LA TOLFA-ALLUMIERE 1. Introduction

La région qui fait l’objet de cet article a pour noyau les monts de la Tolfa, en Italie centrale, plus précisément en Étrurie méridionale, et s’étend sur environ 300 km² (Fig. 1). Elle est délimitée par le �euve Mignone au Nord et à l’Est, le Rio Fiume au Sud et le littoral de Civitavecchia et de Santa Ma-rinella à l’Ouest et au Sud. Cette région est divisé en deux zones principales les monts de la Tolfa et leur projection jusqu’à la façade côtière. Ce cadre géographique correspond aux sites protohistoriques identi�és depuis la �n du XIXe siècle dans le groupe de la Tolfa-Allumiere qui connait une période prospère du Bronze �nal au premier âge du Fer.

La ré�exion que j’ai menée sur l’organisation de ce territoire à travers la répartition des habitats a débuté par la fouille du site de La Castellina del Marangone, situé sur le littoral au Sud de Civitavecchia à environ 70 km de Rome. Par la suite, j’ai essayé de dé�nir l’espace occupé dans l’environne-ment proche du site. Ces recherches antérieures trouvent leur aboutissel’environne-ment logique dans ma thèse de doctorat (Siafi 2009), qui porte sur l’organisation du peuplement dans le secteur compris entre le littoral de Civitavecchia et les monts de la Tolfa et dont le but était de préciser l’occupation générale de cette région en dé�nissant un scénario éventuel dans la mise en place de ce territoire à l’âge du Bronze et au début de l’âge du Fer.

Il existe à l’heure actuelle de nombreuses études sur l’organisation du peuplement dans la région de la Tolfa-Allumiere1. Ainsi, l’approche envisagée dans cet article n’est pas novatrice dans son concept, mais ce sont les moyens employés qui le sont. L’originalité de cette démarche tient essentiellement dans l’adoption de l’outil SIG (Systèmes d’Informations Géographiques). En effet, pour mener à bien ce projet, j’ai eu recours le plus souvent possible à l’outil informatique comme aide à la compréhension et soutien dans la dé�nition de la dynamique d’implantation, avant tout par la mise en forme cartographi-que. Les cartes permettent de manipuler des informations de type spatial, de visualiser les processus d’occupation du sol et de faire apparaître de nouvelles données, comme les particularismes liés au territoire.

1 On peut rappeler brièvement les travaux majeurs et précurseurs de R. Peroni et F. di

Gen-naro ou de M. Pacciarelli, dans lesquels sont posés les bases du mode d’implantation des habitats et de la “gerarchia insediamentale” (di Gennaro, Peroni 1986, 193; Pacciarelli 1982, 79 et 1991, 2000; Peroni 1988, 1994, 2000).

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L’intégration d’informations d’ordre spatial dans les études de peuple-ment du territoire est empruntée aux techniques de la géographie quantitative qui se développent dans les années 1950. La “Spatial Analysis”, avec comme principaux représentants I. Hodder de l’école de Cambridge et Cl. Orton de l’Institut Archéologique de Londres, a posé dans les années 1970 les bases des nouvelles méthodes de lecture des phénomènes spatiaux. L’analyse spatiale, qui consiste à étudier la répartition des artefacts et à caractériser les interactions entre ces objets archéologiques, fait intervenir trois notions fondamentales qu’il convient de dé�nir brièvement: la notion d’habitat, de site et de terri-toire. «Un habitat est un lieu ou l’homme s’est établi, à un moment donné et de manière plus ou moins durable. Un site est une entité qui correspond à une concentration de vestiges archéologiques» (Nuninger et al. 2006, 28).

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Pour P. Leveau, «un site est un lieu où l’on relève la présence de structures ou d’objets liés à une présence humaine» (Leveau 1997, 9). Et en�n, un territoire est un espace organisé que les membres d’une communauté se sont approprié. Il s’inscrit dans un cadre physique et est limité par les territoires qui l’entourent (Leveau 1997, 11). C’est l’ensemble des sites d’une région qui constitue le territoire, un réseau de voies assurant entre eux les liaisons internes et externes. Selon F. Favory et C. Raynaud, «un territoire, est la projection et l’inscription dans l’espace géographique d’une ambition et d’une pratique sociale» (Favory et al. 1999, 500). Autrement dit, les groupes qui s’installent sur un secteur donné et en exploitent les ressources imposent dans le même temps leurs habitudes culturelles.

Dans le secteur situé entre les monts de la Tolfa et le littoral, l’implan-tation humaine a été favorisée par la présence d’un réseau hydrographique capillaire. Ces cours d’eau la plupart du temps de faible profondeur, en particulier l’été, ne devaient pas poser de problèmes majeurs et pouvaient, comme cela est traditionnellement reconnu, être suivis pour conduire de la côte à la zone montagneuse; conférant, dès lors, aux vallées �uviales le rôle de voies ou d’axes de communications. Ainsi, l’expansion de la culture de la Tolfa-Allumiere est, comme on l’imagine, directement issue de ce processus d’échanges et de communications, traduisant des contacts entre les populations au sein même de cette région, avec les régions voisines et vers l’extérieur. La présence de fragments de céramiques mycéniennes sur les sites de Luni-sur-le-Mignone ou Monte Rovello permet d’envisager a minima des contacts d’ordre technologique entre les deux communautés à l’âge du Bronze. De même, les correspondances typologiques entre les objets en céramique ou en bronze du Latium et de Tarquinia à l’Ouest attestent également ces liens étroits entre les différentes communautés. Les dépôts et les nécropoles sont également des indicateurs de ces tra�cs internes ou externes entre les populations (am-bre de la mer baltique, pâte de verre et ivoire d’Italie du Nord ou d’autres contrées plus lointaines). Ce réseau est renforcé au premier âge du Fer par le développement des voies maritimes conduisant en partie à l’abandon des sites montagneux pour investir la côte. Les habitats implantés près des voies de communication devaient très certainement jouer un rôle essentiel dans l’organisation de ces échanges.

Les outils disponibles dans le logiciel ArcGIS, qui offrent différentes pos-sibilités d’analyse cartographique, en particulier le calcul des distances entre les sites soit à vol d’oiseau, soit par rapport au terrain, m’ont aidé à mieux connaître ce réseau. Le calcul de la distance dite pondérée, qui correspond au deuxième cas de �gure, permet de créer un maillage matérialisant les chemins d’accès aux habitats. En couplant celui-ci au calcul du champ de vision de chaque site, il est alors possible de dessiner les frontières potentielles des territoires, qui malheu-reusement aux époques protohistoriques ne laissent aucune trace.

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2. La notion de “territoire visible”

Du Néolithique jusqu’à l’Antiquité, la visibilité a dû être un facteur clé dans le choix du lieu d’installation des sites, mais également de la maîtrise du territoire. Voir sans être vu devait être un facteur essentiel dans le choix d’implantation d’un habitat et ne demandait qu’un investissement minimum. L’utilisation d’ArcGIS permet de déterminer le champ de vision global, mais également la ligne de vue, a�n de savoir si des éléments du paysage obstruaient ou non la vue d’un site à l’autre.

Nous pouvons, sur la base d’une bonne connaissance de l’orographie d’une région, imaginer quel pouvait être le champ de vision des habitats. Grâce à la fonction “viewshed” de Spatial Analyst, il est possible de visualiser dans un angle de 360° le champ de vision d’un habitat sur tous les points du territoire. L’outil va dé�nir à partir du modèle numérique de terrain (sous la forme d’un TIN) l’ensemble des cellules visibles et invisibles. Les premières auront la valeur 1 et les secondes la valeur 0. Concrètement, il dé�nit une série de lignes à partir du point dont on veut calculer la visibilité (Fig. 2). Celui-ci est visible si la ligne de vue dessinée n’est pas interrompue de manière dé�nitive par un point intermédiaire.

Plusieurs paramètres peuvent, bien entendu, altérer cette visibilité en situation réelle, tels que les facteurs météorologiques ou la végétation. Mal-heureusement, nous ne pouvons en tenir compte, car nous ne disposons pas, à l’heure actuelle, de données suf�santes sur ces aspects climatiques; en outre, ces facteurs sont, comme on l’imagine, très dif�ciles à modéliser.

Dans un réseau basé sur des relations hiérarchiques de dépendance, on peut supposer que les habitats mineurs, ainsi que toutes les voies de communication conduisant des uns aux autres, étaient visibles depuis les habitats principaux. Au-delà, des habitats relais auraient pu servir d’intermédiaires. M. Rendeli, lors-qu’il conteste l’utilisation de la méthode des polygones de Thiessen pour dé�nir les limites du territoire d’un habitat, suggère qu’il existe un lien entre l’exercice du pouvoir et la maîtrise visuelle d’un territoire. La sphère d’in�uence est, selon l’auteur, limitée à la zone visible d’un habitat majeur. Dans cette zone, celui-ci doit pouvoir être vu des habitats mineurs et voir lesdits habitats (Rendeli 1993, 20-21). Ainsi, c’est la notion de territoire qui dé�nit l’espace que s’est approprié une communauté. Ce sont les individus qui, entre les différents groupes d’une région, se transmettent les limites d’un territoire. Celles-ci peuvent être matérialisées par des éléments marquants du paysage: c’est dans ce cadre qu’intervient le facteur de visibilité. Le champ de vision délimite de manière arti�cielle l’extension d’un territoire, par l’alternance des espaces visibles et non visibles.

La population de ces habitats cherchait en général la sécurité en s’installant sur une hauteur et parfois en construisant un mur de protection

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enserrant la surface habitée. Cet intérêt pour les hauteurs naturellement dé-fendues traduit également le souci de garder visible l’environnement direct du site. De fait, les cartes de visibilité peuvent apporter différents points de vue. Si l’on se place à la hauteur du site, seul le territoire proche est visible; en se plaçant plus en hauteur, les individus peuvent étendre leur champ de vision bien au-delà. Nous n’avons aucune attestation archéologique de l’existence de tours de guet à l’âge du Bronze dans ce territoire, mais on peut imaginer que la couverture forestière pouvait suf�re à s’élever, de façon à observer tout le territoire. Toutefois, l’existence de forêts dense peut s’avérer contraignante lorsque l’on désire observer des activités pédestres. Le champ de vision limité dans ce contexte pouvait être complété par une signalétique connue de tous. Dans un tel cadre, “l’intervisibilité” permet à l’ensemble des habitats d’un même groupe d’être en relation visuelle, pas uniquement dans le cadre d’un contrôle, mais également pour répercuter de site en site les dangers éventuels.

3. Application de la méthode à la région de la Tolfa-Allumiere A�n de comprendre comment le facteur visibilité a pu agir sur les com-munautés de l’âge du Bronze, j’ai calculé le champ de vision des habitats les plus importants de la zone d’étude. L’altitude de référence utilisée pour le calcul est celle issue de la position de chaque habitat, cumulée à celle du niveau du regard d’un homme de taille moyenne estimée à 1,50-1,60 m (Christopher-son, Guertin, Borstad 1996, 5; Nuninger 2002, 140).

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Les résultats montrent qu’Elceto (Fig. 3, n. 9) devait être le site qui avait le champ de vision le plus large, ce qui n’a rien d’étonnant sachant qu’il s’agit des points les plus hauts du secteur (592 m). Monte Urbano situé à 559 m (Fig. 3, n. 37) présente les mêmes caractéristiques. Plus à l’Est en direction de Rota

Fig. 3 – Champ de vision depuis les habitats principaux des monts de la Tolfa et du littoral de Civitavecchia.

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et Pian della Conserva (Fig. 3, n. 52), on rencontre le site de Rocca di Tolfa à 533 m (Fig. 3, n. 39), dont le champ de vision semble se porter en priorité vers le secteur de Bagni di Stigliano. Chacun de ces habitats disposait d’un point de vue idéal sur les cours d’eau principaux. Ceux-ci devaient constituer des voies d’accès majeures vers le bassin minier. Monte Rovello (Fig. 3, n. 19), avait une importante visibilité sur le Mignone et sa vallée, Elceto sur le Marangone, Rocca di Tolfa sur la vallée du Rio�ume et Tolfaccia (Fig. 3, n. 15) sur la vallée du Monteianni (Fig. 3).

Elceto avait une importante visibilité sur la vallée du Mignone au Nord et à l’Ouest et bien entendu sur le bassin métallifère dont il était sans doute le centre. Les résultats sont plus surprenants pour Monte Rovello. L’habitat, installé sur le versant Est, avait un champ de vision assez limité sur la zone de la Tolfa, mais un accès direct à la vallée du Mignone à l’Ouest jusqu’à la ligne de côte.

La carte des visibilités citée plus haut montre une nette séparation entre, d’un côté Monte Rovello et Elceto et de l’autre Rocca di Tolfa et Tolfaccia.

Fig. 4 – Extension maximale des champs de vision de Monte Rovello et La Rocca di Tolfa. Elceto se situe à la jonction entre ces deux habitats.

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Cette limite est matérialisée par le Marangone qui, de La Castellina, aboutit directement au cœur des monts de la Tolfa. On se rend compte que l’ensemble du territoire était couvert et que chaque habitat était visible par un autre. Monte Rovello l’était par Elceto, qui l’était par Tolfa, qui l’était par Tolfaccia, qui l’était par La Castellina del Marangone et Pyrgi (Fig. 3, nn. 26 et 29).

Le site le plus en retrait était Monte Rovello, mais, grâce à ce “jeu de miroirs”, il pouvait avoir une visibilité totale sur l’ensemble du territoire et sur l’une des voies d’accès principales qu’est le Mignone. Sur le littoral, la Castellina del Marangone disposait d’un angle de vue assez large sur la vallée du Marangone et la côte à l’Ouest de Civitavecchia, jusqu’à l’embouchure du Mignone.

Il est possible de limiter le calcul de ce champ de vision en introduisant dans les paramètres une distance maximale. Même si l’œil humain est théo-riquement capable de voir jusqu’à l’in�ni, il existe une limite selon laquelle il n’interprète plus ce qu’il voit. Laure Nuninger, dans son étude du peuplement en Languedoc oriental, a estimé cette limite à 10 km à vol d’oiseau. Cela cor-respond non pas à «la capacité physique de l’œil, mais à la capacité sélective de l’observateur» (Nuninger 2002, 140).

Je n’ai pas tenu compte de la notion de distance visuelle dans ce travail, car la �nalité était de connaître l’extension maximale du territoire qui pouvait être vu par chaque site. En supposant que l’observateur se soit lui-même ins-tallé en hauteur, on se rend compte qu’une grande partie de la région devait être visible, du littoral jusqu’aux portes du bassin métallifère.

En�n, il faut remarquer l’isolement de Coste del Marano (Fig. 3, n. 35). Il ne semble être compris dans le champ de vision d’aucun autre habitat ma-jeur, lui-même n’ayant pas de visibilité sur les sites implantés dans les monts de la Tolfa. Toutefois, on peut noter que cet habitat avait un champ de vision étendu sur la rive Nord-Est du Mignone et les sites qui y étaient installés, en particulier Luni-sur-le-Mignone (Fig. 3, n. 83) et San Giovenale (hors carte). Monte Rovello et Elceto pouvaient également voir le site de Luni. Ils étaient résolument tournés vers la vallée du Mignone alors que La Castellina del Marangone et la Tolfaccia le sont vers le Marangone.

Il faut signaler également le site d’Acque Fresche (Fig. 3, n. 1), situé au Nord de Civitavecchia, car il était visible depuis quatre de ces principaux habitats (Monte Rovello, Elceto, La Tolfaccia et La Castellina).

En l’état actuel des connaissances, il est impossible de dire avec certitude quel était le rôle de chacun de ces habitats. Cependant, une appartenance au même groupe “économique” de Monte Rovello et Elceto n’est pas exclue. On pourrait, dès lors, envisager un système dans lequel Elceto, en raison de sa position au cœur du bassin minier, assurait la gestion de l’extraction et de la production des minerais et de l’alunite. Monte Rovello, aux portes de ce même bassin et au débouché de l’une des voies principales, pourrait assumer

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la gestion des activités de transformation et de distribution des produits �nis, comme la présence de vestiges liés à ces activités semble l’attester. Le champ de vision de Rocca di Tolfa et Monte Rovello montre une barrière visuelle, une frontière passant au niveau du site d’Elceto à l’Est de celui-ci, on se trouvait dans le secteur de La Tolfa, et à l’Ouest dans celui de Monte Rovello (Fig. 4).

De manière générale, on peut dire que tous ces habitats installés en hauteur avaient une visibilité immédiate sur l’ensemble des voies qui y con-duisaient, et parfois au-delà vers les habitats les plus proche ou très éloignés comme La Castellina et la Tolfaccia par exemple.

Le champ de vision de La Tolfaccia englobait la vallée du Marangone, le Rio Fiume et le Fosso Monte Ianni, avec la série de sépultures implantées dans la vallée du Monte Ianni. Du Nord au Sud, on trouve Montejeanne, Scialatte Montejeanne, Spinacetta-Cicugnola et La Cicugnola (Fig. 3, nn. 18, 55, 43 et 42). De La Rocca di Tolfa, on pouvait voir le versant Est des monts de la Tolfa et les petits habitats qui s’y étaient implantés. Le position-nement du mobilier isolé apporte de précieux éléments de compréhension de ce territoire. En effet, toutes les traces de sites inventoriés à l’Est de Rocca di Tolfa sont dans le champ de vision de cet habitat majeur (Fig. 5). Sur le versant Ouest, les indices d’occupation situés dans la vallée du Mignone, paraissent avoir été visibles de Monte Rovello et Elceto. Les sites, situés sur les �lons de plomb argentifère de fer et de pyrite, près de Poggio Ombricolo (Fig. 3, n. 22) et la Roccaccia, pouvaient être observés de Monte Rovello et d’Elceto.

La Castellina béné�ciait d’une très bonne visibilité sur toute la vallée du Marangone et la côte jusqu’à l’embouchure du Mignone. Il devait exister une relation visuelle entre La Castellina, Acque Fresche, Codata delle Macine et le Larghe (Fig. 3, nn. 8 et 4). Lorsque le champ de vision de l’un s’arrête, commence celui d’un autre.

Lorsque celui de Codata delle Macine s’arrête, le Larghe prend le relais. La vallée à gauche du Marangone, qui n’est pas visible depuis la Castellina, l’est depuis Codata delle Macine. Ce site a, par ailleurs, une visibilité totale sur l’ensemble de la vallée et le Fosso Marangone. Par conséquent, il aurait pu jouer un rôle d’intermédiaire, de relai entre la Castellina, le littoral et le bassin métallifère (Fig. 6).

Les habitats situés au Sud, autour de Pyrgi, avaient tous un champ de vision très large sur l’ensemble de la côte et vers l’intérieur des terres, en particulier sur la vallée du Rio Fiume.

Au Bronze �nal, il semble que la visibilité ait été un des critères déter-minants dans le choix d’implantation de certains sites seulement (Fig. 7), qui devaient être en relation par des activités communes, des liens économiques ou un rapport de rivalité. Cependant, il faut rester prudent, car la

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documen-tation archéologique actuelle ne nous permet pas de trancher et de répondre dé�nitivement à cette question.

Les tableaux ci-dessous et les cartes déjà présentées montrent que ce n’est pas forcément ou pas toujours la visibilité entre habitats qui aurait conditionné les choix d’implantation. Il semble, en effet, que la maîtrise visuelle des principales voies ait été davantage la préoccupation des popu-lations de l’âge du Bronze et ait conditionné la position topographique des habitats.

Comme nous l’avons déjà signalé, Codata delle Macine, surplombant la vallée du Marangone, est un cas particulier. Il a peu de visibilité sur les

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autres habitats, sauf Monte Urbano, et semble isolé, toutefois il béné�cie d’un parfait contrôle visuel sur le Marangone et la vallée.

À l’âge du Fer, seul perdure dans le bassin minier Ripa della Fonte (Fig. 3, n. 38). Ce dernier semble avoir été soit sous-estimé, soit s’être développé de façon conséquente à la �n de l’âge du Bronze. S’il perdure au premier âge du Fer, c’est qu’il présentait un attrait très fort.

Le tableau synthétisant l’intervisibilité entre habitats au premier âge du Fer montre une tendance différente de celle de la �n de l’âge du Bronze (Fig. 8). En effet, il semble que les habitats avaient une visibilité plus étendue les uns sur les autres. Il s’agit sans doute là d’un choix stratégique, notamment

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Fig. 8 – Intervisibilité entre les habitats de la région de la Tolfa-Allumiere au premier âge du Fer. Fig. 7 – Intervisibilité entre les habitats de la région de la Tolfa-Allumiere au Bronze �nal.

pour Ripa delle Fonte qui, de sa position en hauteur, pouvait surveiller la côte et les activités maritimes.

A cette époque, le pôle de peuplement le plus important est situé sur la côte et présente une multitude de petits habitats. Le calcul de la visibilité effectué à partir du site de La Castellina montre un champ de vision plutôt orienté vers les sites positionnés au Nord de Civitavecchia, alors qu’au Sud, Pyrgi devait avoir une vue totale sur les habitats qui l’entourait.

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4. Conclusion

Il est probable que des sites comme Monte Rovello, Elceto, La Tolfac-cia ou Rocca di Tolfa aient eu une dimension plutôt régionale. Ceux dont le champ de vision se limitait à leur environnement proche auraient eu une dimension plutôt locale. Comme nous l’avons suggéré, la visibilité directe sur les voies de circulation entre sites apparaît comme un facteur essentiel dans le choix du lieu d’implantation. C’est au Bronze �nal que ce facteur paraît le plus pertinent, c’est également à cette période que les habitats se placent en hauteur, derrière des murs de protection. Plus la position de l’observateur est élevée, plus son champ de vision est large. Ils avaient une vue idéale sur les centres d’activité du bassin minier, sur ceux de la côte et sur les lieux de production agricole qui pourraient être situés dans la vallée du Mignone, de part et d’autre des monts de la Tolfa.

Même si cette démarche présente des limites que nous avons déjà énoncées (facteurs météorologiques, couvert forestier, précision du MNT, etc.), la relation dé�nie par le facteur visibilité concourt à la compréhension des territoires. Elle permet de montrer les évolutions au niveau de la mise en place des habitats dans le cadre d’un contrôle visuel d’une région. Dans ce but et a�n de dé�nir l’extension possible des territoires des habitats, je me suis appuyée sur la maîtrise visuelle de chacun d’entre eux et le calcul du coût de déplacement de l’un à l’autre.

Il existe plusieurs méthodes permettant de délimiter l’extension maxi-male du territoire des habitats. Dans le cas des polygones de Thiessen, les habitats doivent avoir un rang équivalent, a�n d’étudier sur un même plan les rapports qu’ils entretenaient. Ils sont construits de manière théorique à partir de la distance entre les points de localisation des sites d’habitats. La méthode consiste à «tracer les médiatrices des droites joignant chaque point à ses voisins immédiats» (Hodder, Orton 1976, 59-60).

Les polygones sont une simple reconstitution théorique d’un territoire et sont destinés à susciter une ré�exion. Ils ne délimitent pas son extension réelle, tout comme les cartes d’allocations disponibles dans l’extension Spatial Analyst, à partir desquelles il est également possible de restituer le territoire théorique d’un habitat, mais en se basant sur la physionomie du terrain. En effet, l’outil allocation prend en compte différents paramètres, comme la topographie et les barrières naturelles (cours d’eau ou éléments du relief) pour dé�nir l’extension d’un territoire par rapport au coût de déplacement. Le processus consiste à «affecter chaque cellule à la source la plus proche en fonction de la distance calculée» (Chareille, Rodier, Zadora Rio 2004, 317-344).

Le calcul obtenu à partir de la distance euclidienne correspond aux polygones de Thiessen traditionnels (di Gennaro 1982, 2000). Ainsi, la

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�-gure présentée ci-dessous nous montre la différence d’interprétation du calcul des limites selon que la distance est euclidienne ou pondérée (Fig. 9). Dans le deuxième cas, les limites sont adaptées à la réalité du terrain et s’appro-chent sans doute plus de la division protohistorique des territoires. Il s’agit d’une restitution théorique basée, toutefois, sur des réalités topographiques et archéologiques. En effet, l’intérêt de la méthode réside dans sa capacité à prendre en compte plusieurs facteurs pouvant avoir un impact sur la zone d’attraction d’un habitat par phase d’occupation.

Les cartes de distances pondérées, ou cartes d’allocations, obtenues à l’issue du calcul du coût de déplacement permettent de créer des polygones adaptés à la réalité topographique. Sachant que ces limites décroissent avec la distance, en particulier lorsqu’elles rencontrent celles des habitats voisins, il est possible de dé�nir les frontières des territoires de chaque site. Seules la distance et la topographie sont prises en compte; la notion de niveau hié-rarchique n’intervient pas. Cette méthode permet de mettre en lumière des concentrations d’habitats et de dé�nir des pôles de peuplement. De telles cartes constituent une précieuse source d’information pour l’étude de la mise en place des réseaux de sites. Comme on le sait, la proximité ou l’éloignement peut avoir une in�uence directe sur les relations entre les habitats d’un même secteur géographique et surtout, sur la nécessité de créer un habitat relai au sein du maillage de territoire.

À travers ces différentes analyses se dégagent deux informations princi-pales. Tout d’abord, la structure bipolaire du territoire et ensuite l’organisation

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qui en découle, en deux réseaux à têtes multiples. Comme l’atteste le calcul du champ de visibilité, certains habitats devaient être considérés comme des habitats majeurs:

– Dans les monts de la Tolfa, cette catégorie comprend Monte Rovello, Elceto, La Rocca di Tolfa et Tolfaccia, autour desquels s’organisaient plusieurs sites. – Sur le littoral, la con�guration est la même, avec les sites de La Castellina del Marangone, et peut-être Acque Fresche.

L’utilisation des cartes d’allocations a con�rmé ces constructions et précisé l’extension possible de l’in�uence des habitats majeurs. L’extension maxi-male ainsi dé�nie n’est, bien entendu, pas dé�nitive et est amenée à évoluer au rythme des découvertes archéologiques. On peut, malgré tout, envisager quelques hypothèses.

Fig. 10 – Frontière entre les territoires de Monte Rovello et La Rocca di Tolfa matérialisée par le champ de visibilité et les polygones pondérés.

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En particulier pour Monte Rovello qui perdure du Bronze moyen au Bronze �nal et s’entoure de nombreux autres habitats. La nécropole de Poggio della Pozza (Fig. 3, n. 21) située au pied du site et celle de Forchetta di Palano (Fig. 3, n. 11) plus au Nord attestent l’importance de Monte Rovello. Bien qu’il ne soit pas directement positionné sur les �lons métallifères, il est l’un des plus importants centres de ce contexte.

La limite Est pour l’un et Ouest pour l’autre crée une véritable division du bassin minier en deux zones distinctes. La confrontation de ces données avec les limites créées par les allocations nous permet de suggérer une adap-tation de celles-ci à l’extension maximale de la ligne de vue (Fig. 10). En effet, la maîtrise visuelle de l’un s’arrêtant là où commence celle de l’autre. Il se dessine une frontière naturelle qui pourrait correspondre à l’extension réelle des territoires. On peut voir également que Monte Rovello disposait dès le Bronze moyen d’un vaste champ de vision sur toute la vallée du Marangone et les habitats qui y sont implantés.

Pour terminer cette démonstration, on peut dire qu’il ne s’agit pas d’un réseau polarisé au sens strict, tel qu’ils se construiront dans les périodes suivantes, notamment avec la naissance des grands centres villanoviens. Ce modèle est celui issu de la théorie des “central places” de W. Christaller, c’est-à-dire un lieu central qui exercerait une in�uence sur un ensemble d’habitats satellites et dépendants.

Il semble que les sociétés de l’âge du Bronze aient été moins inégali-taires.

Soraya Siafi UMR 5044 Université de Strasbourg

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ABSTRACT

This article focuses on the organization of settlements in the Tolfa-Allumiere region (Lazio, Italy) in the Final Bronze Age and the beginning of the Iron Age. Our research follows a study on the occupation of La Castellina del Marangone, located about �ve km South of Civitavecchia, and its immediate environment. Many authors have already worked on this topic in Italy, but the originality of the present work is represented by the use of GIS tools to describe the spatial organization of this central Italy region. Each site is located on a Digital Elevation Model (DEM), providing a 2D or 3D view of the landscape. From this DEM, a set of dynamic maps was created detailing the conditions of landscape.

In particular, the analysis of the topography makes it possible to evaluate the exposure in a given direction and to analyse notions of distance and costs of travel in order to de�ne the possible existence of networks. The rivers certainly played a key role in the establishment of major trade routes and communication channels between the coastline and the most rugged Tolfa area. By using ArcGIS we can not only determine the overall �eld of vision but also the line of sight, in order to establish if the landscape obstructed the view between one site and another. Following this analysis and the creation of mapping funds, it was possible to answer the question concerning the reasons that led people to change their lifestyle and occupy the space throughout the Bronze Age.

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