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Sade et le Zen, par Norbert Sclippa Paris: L'Harmattan, 2017. 160pp.

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1736 Sade et le Zen, par Norbert Sclippa Paris: L’Harmattan, 2017.

160 pp. Euros 17.50. ISBN 978-2-343-12028-7.

Le titre du livre de Norbert Sclippa – professeur Emeritus à l’Université de Charleston en Caroline du Sud – est dérangeant et, d’une certaine manière, oxymorique. La juxtaposition de l’ouvrage “abominable” du marquis de Sade, apothéose du crime et de la destruction, et de la doctrine orientale Zen, emblème par excellence de pureté et de calme, est au premier abord paradoxale, pour ne pas dire de compréhension difficile. En réalité, la volonté d’enquêter sur la façon dont “Sade et le Zen ont tous les deux un même but” (9), en plus d’être animée par le goût typiquement sadien de la provocation, repose sur une conception théorique très précise.

L’approche critique la plus répandue dans les dernières décennies consiste à étudier Sade en tant qu’écrivain historiquement situé (voir J. Phillips, “État présent Sade”, French Studies 68 [2014]: 526–533), enraciné dans l’histoire littéraire (M. Delon), philosophique (J. Deprun, C. Warman) et scientifique (A. St-Martin) du dix-huitième siècle. Sclippa s’y oppose et voit dans l’œuvre de Sade l’expression d’un mode de pensée absolu. Dans ses livres précédents – notamment Lire Sade (Paris: L’Harmattan, 2004) et Pour Sade (Paris: L’Harmattan, 2006) – l’Auteur s’était efforcé de montrer comment, dans l’œuvre de Sade, l’obscène n’est autre que l’exemplarité d’une pensée qui s’exprime librement. Renonçant à l’idéal religieux, à la transcendance, Sade aurait, en d’autres termes, élaboré une pensée absolue, partie intégrante d’une expérience totale, souveraine, de l’être entendu comme immanence pleine.

Dans l’ouvrage en question, le Zen et, plus généralement, la philosophie taoïste deviennent le prisme conceptuel à travers lequel est observé ce processus d’érection de la conscience subjective en miroir parfait de l’harmonie de la nature, du Tout, qui caractérise aux yeux de Sclippa la philosophie de Sade. Si le “divin Marquis” et le Zen ont en commun un but pour ainsi dire ontologique, les outils utilisés pour parvenir à ce but sont indubitablement différents : chez Sade, l’oppression du prochain et l’exposé d’un matérialisme intégral ; dans le Zen, l’ascèse et la médiation (à savoir, la pratique de méditation typique du Zen). Ces deux approches ne sont pas contradictoires, selon Sclippa, mais complémentaires, comme le confirme l’analyse des deux principaux points communs à la réflexion sadienne et à la doctrine taoïste : perfection de la nature et fonction du silence. Ces deux idées constituent le fil directeur d’un volume construit de façon non systématique, procédant presque de manière aphoristique, en juxtaposant des réflexions développées à partir soit de thèmes typiques du Zen (le Koan, le Nirvâna, le satori, la bonne vibration, etc.), soit de thèmes spécifiques de la philosophie occidentale (l’éthique, la science, l’immanence, etc.).

En ce qui concerne l’idée de nature, Sclippa montre comment Sade bouleverse complètement la vision normative typique du dix-huitième siècle. Alors que les philosophes (Rousseau et Diderot, par exemple) voient dans la nature un modèle éthique universel régissant les lois et les mœurs, et croient avoir concilié nature et culture en projetant sur la société les lois de la nature, Sade rejette l’illusion d’un universalisme éthique. Pour lui, toute vraie liberté commence et finit avec l’individu et la liberté est décrite comme “un espace intérieur, un savoir et une aventure personnelle” (33). Dans cette perspective, non seulement la liberté ne peut être imposée à l’individu de l’extérieur, mais toute action dictée à l’homme par sa liberté est conforme à la nature, donc moralement acceptable. Si, comme nous le rappelle une formule de La Nouvelle Justine, “tout est à la nature, rien à nous”, on doit reconnaître la perfection de la nature même dans ses aspects qui nous irritent ou nous révoltent, comme le meurtre, la coprophagie, etc.

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Afin de démontrer l’axiome de la perfection de la nature – perfection comprise dans le sens a-moral (ou immoral) du terme – Sade utiliserait une procédure qui est typique du Zen, à savoir la manipulation intellectuelle de l’objet (Sclippa insère aussi la pensée dans cette catégorie) rendue possible par le silence. Le silence – qui se traduit, dans la réflexion philosophique de Sade, par la distance fictionnelle qui caractérise la narration romanesque – permettrait de conjurer l’agressivité des “fantasmes” (la violence, la méchanceté, etc.) toujours latents en nous. D’où la thèse provocatrice selon laquelle l’œuvre de Sade, loin d’être une exaltation de la violence (Sclippa critique sévèrement l’interprétation de Michel Onfray, La passion de la méchanceté : Sur un prétendu divin marquis [Paris: Éditions Autrement, 2014]), constitue une sorte d’antidote à la violence : “La distance fictionnelle établit ainsi chez Sade entre l’acte et sa représentation, dans le silence du texte, et filtrée ainsi par les mots elle déjà ainsi un remède à la violence” (10).

La nouveauté et l’actualité de Sade tiennent, selon l’Auteur, à cette révélation : la connaissance du mal, de la destruction et de la mort est un préalable à l’expérience d’une liberté totale, celle de l’esprit libéré des fausses valeurs acquises par la culture. Il y a ainsi une circularité entre l’être et le non-être, “toute création est le résultat d’une destruction qui l’est d’une création” (151). Dans cette perspective, la douleur, le mal, la souffrance et le vice représentent un contact non aliéné que l’homme entretient avec la nature ; la négativité devienne le véritable savoir philosophique.

En conclusion, Sade et le Zen propose une lecture spéculative, excluant une interprétation strictement académique de Sade, et se rapprochant d’une lecture “idéologique”, parfois hagiographique, qui rappelle celle qu’ont pratiquée certains surréalistes. La thèse philosophique fondamentale du livre rappelle, mutatis mutandis, l’interprétation proposée par Pierre Klossowski dans sa célèbre étude Sade mon prochain (Paris: Seuil, 1947) : alors que Klossowski voit dans l’œuvre sadienne une affirmation paradoxale de l’existence de Dieu, dissimulée derrière l’athéisme, Sclippa découvre, dans l’athéisme et le matérialisme sadiens, le négatif qui fait jaillir la réalité une et universelle, en assonance avec le monisme taoïste.

On peut regretter l’absence presque totale d’une contextualisation historique des idées sadiennes : ainsi la catégorie du matérialisme est postulée plutôt que développée par l’Auteur. Malgré une maîtrise indéniable de l’œuvre de Sade et quelques réflexions d’un intérêt considérable (surtout sur la co-essentialité entre la philosophie sadienne et son expression littéraire), la grande limite de l’ouvrage Sade et le Zen, dans la perspective de l’histoire des idées, consiste à vouloir démontrer l’originalité de Sade par le biais de catégories conceptuelles totalement étrangères à celles du dix-huitième siècle, qui, d’autre part, ne sont pas toujours parlantes pour un lecteur non initié à la philosophie orientale. Le risque, encore une fois, est de faire de Sade – comme l’avait déjà signalé en 1968 Marcelin Pleynet (“Sade lisible”, Tel Quel 34 [1968]: 75–85) – un “épiphénomène monstrueux” (génial ou abominable, peu importe) de l’histoire de la philosophie, plutôt que le produit d’une activité culturelle particulière.

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Description biographique

Marco Menin, maître de conférences en histoire de la philosophie à l’Université de Turin, en Italie, se consacre à la philosophie des Lumières, à l’exploration des relations entre la pensée philosophique et la pensée littéraire en particulier. Il a publié plusieurs articles concernent l’histoire de la sensibilité sur des revues internationales (Rousseau, Diderot, Sade, Bernardin de Saint-Pierre). Il travaille actuellement sur la “philosophie des larmes” à l’âge classique.

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