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En guise d’introduction H . Sancho-Garnier

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Academic year: 2022

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H . Sancho-Garnier

La prévention est l’ensemble des mesures visant à éviter ou réduire le nombre et la gravité des atteintes à la santé. On distingue, selon l’Organisation mondiale de la santé, trois stratégies de prévention :

– la prévention primaire qui a pour but d’éviter les atteintes à la santé (maladie, accident, etc.) en agissant sur les causes de ces atteintes ;

– la prévention secondaire qui a pour but de détecter les mauvais états de santé à un stade de plus grande curabilité ;

– la prévention tertiaire dont l’objectif est de réduire les conséquences chro- niques tant physiques que morales et sociales des problèmes de santé.

Nombreuses sont les personnes, professionnelles de santé ou non, qui sont maintenant convaincues que la prévention primaire pourrait grandement contri- buer à l’amélioration de la santé des populations et qu’une telle politique de santé pourrait être mise en place même dans les pays où les ressources sont limitées.

Cependant, si certains pays ont depuis longtemps attribué à la prévention primaire une place importante dans leur politique de santé, d’autres comme la France l’ont longtemps considérée comme une arme mineure à confier aux éducateurs ou à la société civile. Cette position marginale par rapport au système de santé a souvent cantonné la prévention primaire dans des stratégies d’information pure et, de ce fait, n’a pas promu le développement de recherches tant stratégiques qu’évaluatives dans ce domaine. On peut ainsi remarquer qu’en France le code de Sécurité sociale ne prévoit pas clairement un financement de la prévention primaire.

L’objectif que nous poursuivons dans ce livre est de montrer que la prévention primaire ne peut en aucun cas se limiter à la diffusion d’information, même si celle- ci est un élément stratégique essentiel. Nous nous intéresserons donc ici à une réflexion sur l’ensemble des moyens utilisables pour que la prévention primaire soit la plus efficace possible et, puisque l’on parle d’efficacité, aux méthodes permettant de juger cette efficacité. Nous illustrerons nos propos grâce aux expériences menées par le centre Épidaure, premier département de prévention créé dans un cadre hospitalier spécifique : le Centre régional de lutte contre le cancer de Montpellier (CRLC) (cf. Évaluation « La prévention fondée sur les preuves »).

La prévention primaire n’est possible que si les causes des problèmes de santé – ou

tout au moins les facteurs de risque – sont connus. L’identification de ces facteurs

pour de nombreuses maladies ou atteintes à la santé ouvre, à l’heure actuelle,

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d’immenses perspectives et ce d’autant plus que certaines causes sont communes à diverses maladies. Ainsi, les actions visant à réduire tabagisme, alcoolisme, surpoids, sédentarité peuvent permettre de réduire la fréquence des cancers, des maladies car- diovasculaires, du diabète, mais aussi des accidents de la route, causes majeures de mortalité dans les pays industrialisés ; la vaccination anti-hépatite B permet dans les pays d’endémies de se protéger non seulement contre l’hépatite mais aussi contre le cancer primitif du foie.

Les connaissances sur les causes ou facteurs de risque des atteintes à la santé des populations ne représentent pas à l’heure actuelle un obstacle à la prévention, mais la connaissance ne suffit pas : il faut pouvoir supprimer ou réduire l’exposition des sujets aux facteurs influençant l’apparition de problèmes de santé. Ces facteurs peu- vent être exogènes, de type environnemental (radon, pollution), comportemental (tabac, alcool), ou mixte (ultraviolet, surpoids, etc.). Ces facteurs externes interagis- sent avec des facteurs endogènes (âge, métabolisme, polymorphisme génétique, etc.) dont certains peuvent être prépondérants (mutation génique). Les effets des différents facteurs sont soit additifs, soit multiplicatifs. À l’inverse, il exis- te aussi des facteurs protecteurs endogènes et exogènes. Au total, l’apparition d’un problème de santé chez un sujet est souvent la résultante de très nombreux méca- nismes « pro et contra », ce qui explique la grande variabilité des circonstances d’ap- parition des maladies en particulier.

Le tableau I illustre la variation de la proportion de décès par cancer attribuable à différents facteurs exogènes, en France. On peut estimer la part attribuable aux différents facteurs identifiés dans la mortalité due aux maladies les plus fréquentes, mais cette estimation est sujette à de grandes variations car elle dépend de divers éléments, en particulier de la prévalence des expositions dans la population étudiée.

Tableau I - Variation de la proportion de décès par cancer attribuable à différents facteurs exogènes (adapté de C. Hill et al. [1]).

Facteurs Proportion de décès Intervalle d’estimation (%) par cancer (%)

Tabac 22 17 à 32

Alcool 12 8 à 16

Vie reproductive 7 1-13

Alimentation 35 10 à 70

Infection 9 5 à 20

Professions 5 2 à 10

Pollution air, eau 2 1 à 5

Radiations (UV et RI) 3 1 à 5

Pratiques médicales 1 < 1 à 3

Facteurs génétiques 5 0,5 à ?

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De plus, en termes de prévention, la part attribuable n’est évidemment pas la part évitable qui, elle, dépend de la possibilité de soustraire les personnes à l’exposition incriminée ou de supprimer l’effet de ces expositions (par la vaccination par exemple).

L’efficacité de la prévention dépend donc de la possibilité de contrôler les expo- sitions à risque pour la santé, qu’elles soient environnementales ou comportemen- tales. Le contrôle des expositions peut être de type collectif ou individuel.

• Le contrôle collectif peut se faire par des lois et des règlements et paraît, a prio-

ri, un moyen particulièrement efficace car il peut englober l’ensemble de la popula-

tion exposée et n’a pas recours, en principe, à la bonne volonté individuelle ; enco- re faut-il que ces lois et ces règlements soient votés d’une part et appliqués d’autre part. Les difficultés d’obtenir une législation concernant des expositions reposent sur les conséquences politico-économiques qu’elle entraîne et sur la contrainte sur les libertés individuelles qu’elle représente. De plus, ces risques concernent essen- tiellement les expositions professionnelles et la pollution environnementale qui, hors accident exposant toute une population, n’intéressent qu’une faible part des problèmes de santé d’un pays.

Le contrôle individuel concerne la modification de comportements qui sont le plus souvent acquis depuis plusieurs générations et qui représentent à l’heure actuelle, dans les causes des maladies les plus fréquentes, la part la plus importante.

L’action sur les comportements individuels doit aller bien au-delà de la simple information sur des règles hygiéniques. Les nouveaux défis engendrés par la séden- tarité, par une consommation trop élevée de graisse et de sucre sont similaires à ceux soulevés par l’épidémie de tabagisme ou par les problèmes liés à l’alcoolisme.

Ces comportements sont souvent encouragés par l’environnement socio-écono- mique : intérêts économiques puissants, publicités à la télévision, gondoles de pro- duits alimentaires dans les supermarchés, ascenseurs, escaliers roulants, voitures…

Tous ces facteurs environnementaux contribuent à un style de vie à risque pour la santé. Les messages de prévention sont noyés dans un océan d’informations dont la plupart joue contre la santé. Aussi, seule l’organisation de programmes globaux, comme le montre la lutte contre le tabagisme, permet de changer le contexte

« sociétal » qui influence les comportements individuels. Le qualificatif global signi- fie que les programmes recouvrent diverses activités et approches stratégiques. Il repose sur une vaste coalition et sur une approche intersectorielle faisant appel à des acteurs dans et en dehors du secteur de la santé. Ces programmes doivent être fon- dés sur des ressources financières et humaines suffisantes, sur une infrastructure adéquate et se poursuivre sur une longue période de temps. Ainsi, la modification des comportements va de pair avec un changement socioculturel général et avec la création d’un milieu sanitaire et éducatif adapté aux différents groupes sociaux.

Il est important d’identifier les actions qui permettent d’agir sur les comporte-

ments et donc les déterminants de nos choix de vie en lien avec la santé. La réflexion

dans ce domaine est encore peu développée en France. Les déterminants de la santé

(plusieurs facteurs de risque pour une même pathologie), les conséquences sur la

santé (diverses pathologies liées au même facteur), les comportements des individus

et des populations (selon l’âge, la culture, le niveau socio-économique, la géogra-

phie, etc.) sont autant de variables à gérer et à intégrer aux multiples modalités

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d’actions (information, communication, éducation, formation, législations, mani- festations, etc.). Seules des actions communautaires peuvent faire évoluer les nor- mes sociales, modification indispensable à l’évolution des individus eux-mêmes.

En termes d’intervention, on peut dégager quatre grands axes d’orientation représentant les quatre piliers de la prévention : la globalité de l’appréhension du domaine, la multidisciplinarité et l’intégration des actions, la cohérence des messages et des interventions, l’évaluation des processus et des impacts.

L’approche globale consiste à mettre en perspective les déterminants de la santé, les caractéristiques des populations ciblées et les différentes possibilités d’actions qui se complètent :

– un premier mode d’action dans l’approche globale a pour cible l’individu et consiste à influencer son comportement par le biais de ses connaissances. Cela inclut les campagnes d’information, les initiatives d’éducation, les brochures, les lignes téléphoniques, les émissions de télévision, les sites internet, etc ;

– un deuxième mode d’action concerne l’environnement, les comportements étant aussi influencés par les changements contextuels. Les changements environ- nementaux peuvent être le fait de loi, de réglementation, de mesures économiques, de publicité, de promotion, etc. Les campagnes médiatiques peuvent mener à une coopération entre les leaders de la société civile, du monde du travail, des institu- tions religieuses, ces partenariats multiples ayant pour but un changement des conditions environnementales afin de favoriser des changements comportemen- taux.

La multidisciplinarité permet l’approche de la prévention par des acteurs diffé- rents appartenant à des champs complémentaires : santé, éducation, économie, cul- ture, sport… et de démultiplier les impacts. On peut ainsi agir à tous les niveaux des croyances et des environnements en prenant en compte les freins et en utilisant les leviers identifiés. Des actions intégrées dans les divers secteurs de la société favori- sent la compréhension des messages, leur cohérence, l’acquisition de savoirs et, in

fine, leur appropriation (savoir-être).

La cohérence des messages, des actions, des acteurs, des outils… oblige à régler les controverses, évite les ambiguïtés et les informations erronées, relativise les scoops. Elle permet aussi de clarifier le rôle de chacun des acteurs dans l’ensemble des territoires de vie, facilite la lisibilité et la compréhension et simplifie l’appro- priation. Organiser la prévention de façon cohérente est une priorité pour tous les pays !

Enfin, l’évaluation doit être prévue dès l’élaboration de tout projet, car elle per- met de vérifier si les objectifs de l’action correspondent aux besoins mesurés ou res- sentis, si les processus élaborés permettront d’atteindre les objectifs, puis si ces objectifs ont été atteints et si les résultats peuvent être extrapolés à d’autres cibles.

Seule une balance coûts/bénéfices positive devrait permettre de généraliser des

actions. L’interprétation des résultats obtenus et leur diffusion aux différents acteurs

devraient permettre de ne pas réinventer la roue de multiples fois et d’améliorer

progressivement, comme dans le domaine thérapeutique, l’efficacité de la préven-

tion. Choisir des interventions qui ont bien fonctionné dans un pays ou dans un

contexte spécifique n’est pas une garantie de succès si l’on en change, c’est pourquoi

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les interventions doivent être adaptées localement et doivent être systématiquement réévaluées de manière à s’assurer qu’elles fonctionnent et que les buts de ces inter- ventions sont atteints.

Ainsi, pour gagner le combat de la prévention, les programmes doivent devenir puissants et performants en termes de coût-efficacité. Les décideurs appartenant au domaine de la politique, de l’économie et de la société dans son ensemble doivent travailler en collaboration pour pouvoir promouvoir un environnement et un style de vie favorable à la santé. C’est aussi du pouvoir de conviction des divers acteurs de santé dont dépend l’efficacité de la prévention. La formation de tous les acteurs de terrain y compris des médecins aux méthodes d’action comportementale sont des priorités incontournables de la santé actuelle et future. Enfin, dans ce domaine de la prévention, nous devons aussi développer d’autres savoir-faire car, même si l’inten- tionnalité est présente parmi les acteurs multiples et de la prévention, quelques pis- tes de recherche peuvent être évoquées ici :

– l’adoption de stratégie de médiation interactive et dynamique entre les gens et leur environnement ;

– la nécessité de tenir compte des modifications culturelles de la société dont les groupes se sont multipliés et diversifiés ;

– l’importance de rendre l’individu capable d’exercer un meilleur contrôle de sa santé par le développement de l’estime de soi, le sens de la compétence personnelle ;

– la primauté de l’intérêt collectif sur l’intérêt individuel…

Les stratégies à utiliser, quel que soit le type d’intervention (éducation, informa- tion, réglementation, etc.) doivent être améliorées, adaptées, et évoluées en perma- nence pour s’accorder aux sociétés et à leur changement.

La mise en place de programmes globaux de prévention représente un grand défi, il est nécessaire d’appliquer le meilleur savoir-faire possible et une collabora- tion internationale est importante. Il est évidemment recommandé de tirer parti de toutes les connaissances et de toutes les ressources disponibles en la matière.

L’équipe d’Épidaure mène depuis 15 ans, une expérience relativement unique en France combinant, dans le domaine de la prévention, les connaissances théoriques de base (épidémiologie, sciences de l’information, pédagogie), l’expérience de ter- rain (dans et hors les murs de notre structure) et un regard en retour sur ses activi- tés par une évaluation permanente.

Cet ouvrage vous présente donc l’outil « Épidaure », les bases théoriques de la prévention, les expériences menées et quelques pistes de réflexion sur les actions à mener pour, tous ensemble, améliorer notre santé.

Référence

1. Hill C, Doyon F, Sancho-Garnier H. (1998) Épidémiologie des cancers. Paris :

Flammarion Médecines-Sciences

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