• Non ci sono risultati.

Infections génitales à HPV. Bases fondamentales

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Condividi "Infections génitales à HPV. Bases fondamentales"

Copied!
43
0
0

Testo completo

(1)

La recherche de l’agent causal a été à la base du succès de la lutte contre la plupart des maladies infectieuses. On aurait pu penser que l’acquisition des outils néces- saires pour détecter la présence des papillomavirus humains (HPV) aurait été sui- vie rapidement d’une large utilisation de ces tests pour détecter les femmes à haut risque de néoplasies cervicales présentes ou à venir. Cependant, bien que des sondes moléculaires pour la recherche des HPV aient été disponibles dès 1983, les méde- cins ne se sont pas intéressés tout de suite aux applications cliniques potentielles de ces tests. La raison de ce désintérêt réside, en partie tout au moins, dans les concep- tions erronées créées par les premières études de PCR qui utilisaient des modalités très imprécises. Ceci a conduit à des publications montrant une faible sensibilité, une spécificité médiocre et à des estimations considérablement atténuées quant à la relation entre l’infection à HPV, l’activité sexuelle et les néoplasies cervicales.

Une nouvelle génération de tests HPV a permis de montrer l’étroite association entre l’infection à HPV et le cancer invasif du col utérin. Leur forte sensibilité et une spécificité acceptable ont été rapportées. La revue des études épidémiologiques sur l’infection à HPV établit le rôle de ces virus comme facteur causal indépendant des néoplasies cervicales intraépithéliales (Cervical Intraepithelial Neoplasia, CIN) et du cancer du col. Ces données prouvent aussi la valeur potentielle du test HPV dans le domaine clinique.

Les associations importantes, rapportées dans la littérature, peuvent être résu- mées comme suit : des études cas-contrôles ont établi que la plupart des femmes ayant une CIN ont un HPV détectable dans des proportions significativement plus élevées que les contrôles ; la détection des HPV est associée à un risque de néopla- sie cervicale au moins dix fois plus élevé que les sujets HPV négatifs ; plus la dys- plasie a un grade élevé, plus forte est la prévalence de l’infection à HPV ; le risque relatif d’association d’une CIN 3 avec l’HPV est de 40 ; le pourcentage des CIN at- tribué à une infection à HPV est d’au moins 90 % ; la détection des HPV chez des femmes ayant des frottis normaux est un facteur prédictif de risque accru de détec-

Bases fondamentales

(2)

tion de CIN futures ; enfin, le risque de progression de lésions liées aux HPV peut être corrélé aux types viraux (1).

Étant donné l’association très forte qui existe entre les HPV et les néoplasies cer- vicales et la possibilité que les quelques tumeurs HPV négatives puissent représen- ter de rares exemples de détectabilité réduite, l’infection virale a été proposée comme l’événement précurseur plus ou moins lointain susceptible de conduire au cancer du col.

Caractéristiques des HPV. Biologie virale

Les HPV sont des virus de petite taille (de 45 à 55 nm de diamètre), non envelop- pés, composés de 72 capsomères disposés selon une symétrie icosaédrique. Leur gé- nome est constitué d’une molécule circulaire d’ADN double brin de 8 000 paires de bases environ. La diversité génomique des HPV a permis d’individualiser plus de 120 génotypes (2).

Leur classification, basée sur le génotype et l’analyse phylogénétique (fig. 1), per- met de les différencier en fonction de leur tropisme (cutanés ou muqueux), de leur propriété biologique et de leur potentiel oncogénique (bas risque et haut risque) (3). Parmi les HPV cutanés, les HPV 1, 2, ou 4 sont responsables des verrues plan- taires et palmaires. Quant aux HPV 5 et 8, ils sont majoritairement retrouvés chez des patients atteints d’une génodermatose rare, l’épidermodysplasie verruciforme.

Parmi les HPV muqueux, les HPV dits à bas risque oncogène (HPV 6, 11) sont res- ponsables de lésions anogénitales bénignes telles que les condylomes acuminés et les HPV à haut risque oncogène (HPV 16, 18, 31, 45) sont associés aux lésions pré- cancéreuses et cancéreuses du col de l’utérus (tableau I). Toutefois, il n’est pas rare de détecter plusieurs types d’HPV au sein d’une même lésion.

L’analyse comparée des séquences nucléotidiques des papillomavirus dans les différentes espèces a révélé une organisation génétique commune. Une dizaine de phases ouvertes de lecture ou ORF (open reading frame des Anglo-Saxons) portées par un seul des deux brins d’ADN sont groupées en une région E (early) codant pour des protéines non structurales et une région L (late) codant pour les protéines de capside (fig. 2, tableau II). La région non codante (non coding region, NCR) com- prenant 400 à 1 000 nucléotides et située entre les ORF L1 et E6/E7 est très variable.

Elle contient un site ori (site d’origine de la réplication virale), les promoteurs des gènes précoces et des séquences de régulation de la réplication et de la transcrip- tion. Ces séquences sont des sites reconnus par des facteurs d’origine cellulaire ou virale.

La protéine virale E2 intervient à la fois dans la réplication et la modulation de

la transcription du génome des HPV. La réplication virale est étroitement contrô-

lée par la protéine E1, couplée à la protéine E2. L’hétérodimère E1-E2 se lie à la sé-

quence ori qui possède un site de liaison pour E1 (E1BS : E1 binding site) flanqué

lui-même de plusieurs sites de liaison pour E2 (E2BS). La protéine E2, sous forme

d’homodimère module la transcription des gènes E6/E7 ; elle bloque l’expression

de ces gènes. Les protéines E5, E6 et E7 sont impliquées dans les processus d’im-

(3)

Fig. 1 - Arbre phylogénique basé sur la séquence de E6.

(4)

Tableau I - Types d’HPV dans les lésions génitales.

Fig. 2 - Organisation du génome d’HPV 16.

Types de lésion génitale

Types d’HPV

Moins prévalents Plus prévalents

Condylomes

acuminés 42, 44, 51, 53, 83 6,11

Lésions intraépithéliales

18, 26, 30, 33, 34, 35, 39, 40, 42, 43, 45, 51, 52, 57, 58, 59, 61, 62, 64, 53, 54, 55, 56, 66, 67, 68,

69, 70, 71, 73, 74, 79, 81, 82, 83, 84, 6, 11

16

Cancers cervicaux et anogénitaux

18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 54, 56,

58, 59, 66, 68, 69 16

(5)

mortalisation et de transformation cellulaire. La protéine L1 est la protéine majeure de capside. Capables de s’auto-assembler en l’absence d’autres protéines virales pour former des particules virales vides ressemblant à des capsides et dénommées VLP (virus like particules), ces protéines L1 possèdent les mêmes épitopes conformation- nels que la protéine native et sont hautement immunogènes. Elles sont une source d’antigènes pour le développement de tests sérologiques ELISA et pour la produc- tion de vaccins. La protéine L2, protéine mineure de capside, est capable de lier l’ADN viral et de le positionner correctement au sein de la capside. En association avec la protéine L1, elle permet l’assemblage du virus et la stabilisation de la cap- side.

Les HPV infectent les cellules souches basales des épithéliums pluristratifiés vrai- semblablement au profit d’une microlésion. Selon le génotype, l’entrée des virus dans les cellules se fait par endocytose. Le transport cytosolique des particules vi- rales emprunte alors les réseaux de microtubules et des filaments d’actine pour se diriger vers le noyau. Enfin, la translocation de l’ADN des HPV dans le noyau cel- lulaire nécessite le démantèlement de la capside virale (4).

Le cycle viral (fig. 3) comporte deux phases distinctes (5). La première, non pro- ductive, est observée dans les cellules basales de l’épithélium qui conservent des pro- priétés de division. Le nombre de génomes d’HPV atteint alors 50 à 100 copies par noyau. Le nombre de copies d’ADN viral est ensuite maintenu dans les cellules filles dont l’arrêt du cycle cellulaire et la différenciation, normalement observés lors de l’ascension des cellules dans l’épithélium, sont retardés par l’infection. La réplica- tion du génome viral se fait classiquement sous forme épisomale, sous le contrôle des deux protéines E1 et E2. Cette réplication est à l’origine d’un effet cytopatho- gène caractéristique des infections par HPV. La seconde phase conduit, en plus de l’amplification des génomes viraux, à l’expression des protéines tardives et à la pro- duction de virions. Cette phase, étroitement dépendante du processus de différen-

Tableau II - Rôle des protéines des papillomavirus à haut risque.

Protéine Fonction

E1 E2 E3 E4 E5 E6 E7 E8 L1 L2

Réplication de l’ADN viral

Réplication, régulation de la transcription Pas de fonction connue

Maturation des virions

Stimulation de la prolifération cellulaire

Protéine oncogène, favorise la dégradation de la protéine p53

Protéine oncogène, favorise la dégradation de la protéine de susceptibilité au rétinoblastome pRb

Pas de fonction connue Protéine majeure de capside Protéine mineure de capside

(6)

ciation des cellules épithéliales, ne se déroule que dans les couches les plus superfi- cielles de l’épithélium. Les virions matures et infectieux sont alors libérés au cours du processus de desquamation et les risques de transmission à un partenaire sont possibles.

En conclusion, on retiendra que la réplication virale n’a lieu que dans les couches superficielles très différenciées des épithéliums malpighiens alors que dans les couches basales, seules sont exprimées les régions précoces. L’effet cytopathogène résultant de la réplication des HPV se traduit par la présence de koïlocytes, cellules vacuolisées à gros noyaux dont la présence dans les frottis est pratiquement patho- gnomonique d’une infection virale à HPV.

Données épidémiologiques.Transmission

Parmi les génotypes d’HPV (près de 120), une vingtaine présente un tropisme gé- nital. Parmi eux, on distingue les HPV dits à « haut risque » (HPV 16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56 et 58) et les HPV dits à « bas risque » (HPV 6, 11, 42, 43 et 44). De nombreuses études ont montré que les femmes infectées par les HPV à haut risque ont un risque élevé de progression vers une CIN par rapport à celles infectées par les HPV à bas risque et une incidence marquée de cancers du col par rapport aux femmes non infectées (6, 7, 8, 9, 10, 11).

La distribution de ces types varie avec la géographie mondiale. Sur une série de cancers invasifs provenant de 22 pays (Amérique, Europe, Afrique, Asie), la préva- lence de l’HPV 16 est prédominante (50-60 %), suivie de celle de l’HPV 18 (10- 12 %), de l’HPV 31 et 45 (4-5 % chacun), de l’HPV 33 (3 %)… En Amérique du

Fig. 3 - Le cycle de réplication viral.

2

1

1 Phase non productive 2 Phase productive

(7)

Nord et en Europe, environ 70 % des cancers du col utérin sont associés aux HPV 16-18 et en Asie du Sud-Est, les HPV 18 sont présents avec une fréquence élevée de 32 % (12).

La voie sexuelle représente la voie traditionnelle de transmission (13, 14, 15).

Les infections à HPV, exceptionnelles chez les femmes vierges, sont très fréquentes chez les jeunes femmes en période d’activité sexuelle (16, 17, 18). Elles sont majo- ritaires parmi les infections sexuellement transmissibles. Sept femmes sur 10 ren- contreraient l’HPV au moins une fois au cours de leur vie sexuelle. Dans une série d’étudiantes américaines âgées de 18 à 20 ans, il a été montré que l’ADN des HPV est retrouvé dans 28 % de la population, alors que des anticorps anti-herpès et anti- chlamydiae ne sont retrouvés que chez 3 % des jeunes femmes ; Trichomonas va-

ginalis a rarement été observé (0,2 % des cas étudiés) (19).

Le rôle des HPV dans l’épidémiologie des néoplasies intraépithéliales est l’un des plus fascinants développements de nos connaissances sur les processus de car- cinogenèse du col de ces dernières années. Aujourd’hui, nous connaissons avec pré- cision les mécanismes moléculaires par lesquels les HPV agissent dans le développement des néoplasies.

Infection à HPV

L’infection génitale à HPV est l’une des infections sexuellement transmissibles les plus fréquentes. Alors que les premières études utilisant la PCR dans des conditions non satisfaisantes indiquaient un taux de prévalence de l’infection d’environ 80 %, ainsi que des variations importantes pour les génotypes de HPV chez les femmes saines et celles présentant une pathologie cervicale, les études plus récentes utili- sant des PCR plus spécifiques indiquent en fait que moins de 10 % des femmes saines après 35 ans sont porteuses d’HPV.

L’exposition aux HPV se produit le plus souvent chez la femme jeune, peu après le début de son activité sexuelle. Le taux d’infection à HPV chez la femme jeune se situe entre 19 et 49 %.

La prévalence de l’infection à HPV est fonction de l’âge : le pic de prévalence se situe entre 20 et 25 ans ; cette prévalence diminue ensuite très sensiblement (20, 21, 22) (fig. 4a, b, c et d). Ce pic de prévalence correspond assez bien à celui des atypies cytologiques (koïlocytes) causées par les HPV. Il est par ailleurs démontré que la présence de HPV chez les jeunes femmes est fortement corrélée au nombre de partenaires sexuels (fig. 5) et il est vraisemblable que plus de 50 % des femmes en activité sexuelle sont ou ont été exposées aux HPV. À partir d’un échantillon de 242 jeunes filles âgées de 15 à 19 ans et recrutées au plus tard 6 mois après leur premier rapport, Collins démontre, sur un suivi de 3 ans, que le risque d’exposi- tion à l’HPV après le premier rapport est de 46 %, les HPV à risque sont les plus fréquents (18).

Parce que la transmission se fait par contact et non par le sperme ou le sang,

le préservatif peut protéger l’homme mais pas la femme d’une éventuelle auto-

transmission.

(8)

Fig 4a - Fréquence de l’infection à HPV et des atypies koïlocytaires selon l’âge.

Fig. 4b - Pourcentage de jeunes filles âgées de 15 ans ayant déjà eu un rapport sexuel (2001/2002).

Adapté de 1) Curie et al. Health Behaviour in School-aged Children (HBSC) study : 2001/2002 survey ; 2) Bozon (2003) Population et Sociétés 31 : 3-13.

(9)

Fig. 4c - Prévalence de l’infection HPV selon l’âge.

Fig. 5 - Risque cumulé d’infection HPV après le 1errapport.

Fig. 4d - Prévalence de l’infection HPV selon l’âge aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.

Adapté de P.W. Melkert (29) Adapté de C.B. Woodman (42)

Adapté de S. Collins (18)

(10)

La diminution du taux de prévalence avec l’âge reflète l’acquisition d’une im- munité aux différents types d’HPV mais peut correspondre à la diminution du nombre de partenaires. Elle suggère qu’une grande proportion des infections à HPV sont transitoires. Toutefois, si l’acquisition d’une immunité naturelle spécifique est responsable de la disparition des virus avec l’âge, nous ne savons pas si cela cor- respond à une élimination du virus ou simplement à la non-détection par les tech- niques habituelles d’une faible quantité de virus résiduel. Aussi, la détection de l’ADN des HPV chez la femme après 30 ans reflète souvent la persistance de l’in- fection qui est souvent corrélée à une forme clinique. De la même façon, l’infec- tion à HPV 16 ou 18 et une charge virale élevée sont significativements corrélées à la présence de lésions plutôt qu’à une forme latente (23, 24). Le suivi au long cours des femmes par typage viral utilisant des méthodes ultrasensibles ne confirme pas toujours la progression de ces cas en CIN. Seules les méthodes détectant les types 16 et 18 et/ou une charge virale élevée permettraient de prédire plus spéci- fiquement le risque de lésion actuel ou futur.

Néoplasies cervicales

La majorité des études confirme une augmentation très sensible de l’incidence et de la prévalence des CIN. La moyenne d’âge des femmes porteuses de CIN a dimi- nué, suggérant l’âge précoce de l’acquisition des HPV. Ces observations coïncident avec l’augmentation d’incidence des cas de cancer du col chez les femmes jeunes avant 40 ans dans certains pays (25).

Malgré le succès attribué au dépistage cytologique de masse dans la diminu-

tion de l’incidence du cancer du col, une augmentation de l’incidence des carci-

nomes in situ a été observée aux États-Unis chaque année, totalisant 200 % à 300 %

d’augmentation depuis ces dernières décades. Par ailleurs, même dans les pays où

le dépistage du cancer du col a fait la preuve de son efficacité par la diminution de

son incidence, les récentes données rapportées à l’âge ont montré, en particulier

en Angleterre et États-Unis, une augmentation des cancers du col chez les femmes

jeunes dans les tranches 25-29 ans et 30-34 ans (27) ; cette tendance ne semble pas

cependant confirmée ailleurs. L’augmentation d’incidence du cancer du col semble

limitée au type de cancer du col qui est le moins bien détecté, à savoir l’adénocar-

cinome du col. Même dans les pays où le dépistage a fait la preuve de son effica-

cité, l’incidence de ce cancer n’a pas diminué. Dans les pays développés, son

incidence est estimée à 2/100 000 alors que celle du carcinome épidermoïde est en

moyenne de 10/100 000 (26). D’autre part, l’augmentation de risque de cancer du

col, quel que soit le type de cancer, a été observée lorsque les intervalles du dépis-

tage excédaient deux ans. Les femmes ayant un dépistage triennal ont un risque

accru (multiplié par 3,9) de développer un cancer du col comparées aux femmes

dépistées tous les ans et ce risque augmente de treize fois pour les femmes dont

l’intervalle est de plus de dix ans. Cependant le risque de développer un cancer du

col est très faible pour les femmes qui suivent sans discontinuer un calendrier de

dépistage très régulier de 20 à 65 ans (1,4/100 000).

(11)

Infection à HPV et néoplasies cervicales

Dans le monde, deux tiers des cancers du col sont dus aux HPV 16 et 18 (fig. 6).

En Europe, près de 70 % des cancers du col sont associés aux HPV 16-18. En Asie du Sud-Est, les HPV 18 sont présents dans près de 32 % des cas alors que, en Amérique du Nord et en Afrique, les HPV 45 sont détectés en moyenne dans 13 % des cancers du col (11, 12).

Les deux facteurs de risque traditionnels du cancer du col sont l’âge précoce des premiers rapports et le nombre de partenaires sexuels (30, 31). Le risque di- minue graduellement en plateau (fig. 4a, b, c). Cela suggère la vulnérabilité de la zone de transformation du col à un âge précoce. Lors des premiers rapports, cette vulnérabilité tient probablement à l’immaturation de la zone de transformation du col et à la métaplasie malpighienne active chez la jeune femme rendant cette zone sensible à l’exposition d’un agent sexuellement transmissible. On ne peut exclure le rôle des modifications hormonales et leur conséquence sur l’immunité. Toutefois, l’association à l’âge précoce des premiers rapports est plus souvent corrélée au nombre de partenaires sexuels. Cependant un seul partenaire suffit pour être ex- posé et majorer le risque (fig. 5). L’association entre l’activité sexuelle et le déve- loppement des CIN a été rapportée comme directement corrélée au risque de

Fig. 6 - Distribution mondiale des HPV dans les cancers du col.

Adapté de N. Munoz (12).

(12)

l’infection cervicale à HPV chez les femmes jeunes (32, 33, 34). En Europe, 15 à 40 % des femmes de 15 ans sont sexuellement actives (fig. 4b). Le rôle du parte- naire masculin influence le risque (35, 36, 37, 38, 39). L’identification des hommes qui ont plus d’une partenaire dans le risque de développement de CIN chez la conjointe suggère un facteur étiologique sexuellement transmis. Aussi l’importance de la vie sexuelle de la femme et de son partenaire, en termes de risque de déve- loppement de cancer du col, est-elle aujourd’hui bien comprise comme la consé- quence de l’exposition à l’infection aux HPV. De la même façon que l’âge précoce des premiers rapports comme facteur de risque de cancer du col n’est que le reflet de l’acquisition précoce des HPV, le nombre de partenaires sexuels est aussi la tra- duction de l’exposition répétée aux HPV. Ainsi, l’exposition à un seul partenaire sexuel est associée à la détection de l’ADN des HPV par PCR dans 21 % des cas, l’exposition à 10 partenaires ou plus est significativement corrélée à une augmen- tation de la détection d’environ 69 %.

Malgré la fréquence relative de l’infection à HPV chez la jeune femme, les CIN à cet âge sont relativement rares (fig. 7a, b) (21, 30, 31). Cependant les CIN 3 de- meurent fréquentes chez les jeunes, le pic de fréquence est estimé à 4/1 000 entre 25-29 ans (fig. 7b). Ainsi, entre 15 et 25 ans, la fréquence de l’infection à HPV est de 30 % à 35 %, celle des atypies koïlocytaires est d’environ 4 %, celle des CIN 3 est de 1 % et les cancers du col sont pratiquement inexistants. Chez les femmes ayant des frottis normaux, la prévalence de l’infection à HPV diminue avec l’âge.

Elle passe ainsi de 30 % entre 15 et 25 ans à 10 % après 30 ans. De la même façon, la prévalence de l’infection à HPV d’après les atypies koïlocytaires observées sur les frottis diminue avec l’âge, passant de 4 % entre 15 et 20 ans à moins de 1 % après 55 ans (fig. 4a, b, c, d). À l’inverse, l’incidence des CIN 3 augmente avec l’âge.

On note un pic entre 25 et 29 ans et une diminution par la suite probablement due en partie à un dépistage insuffisant après 30 ans. Ainsi, entre 15 et 20 ans, la pré- valence des CIN 3 se situe à 0,01 % pour atteindre entre 25 et 30 ans un taux de 0,1 % et diminuer à environ 0,01 % après 55 ans. De la même façon, l’incidence du cancer du col augmente en plateau jusqu’à 35-39 ans et continue d’augmenter très légèrement après cet âge-là. Dans les pays développés, elle est évaluée à envi- ron 0,1 pour 100 000 entre 15 et 20 ans, 10 pour 100 000 entre 35 et 39 ans et 12 pour 100 000 vers 55 ans (fig. 7a).

Autour de la quarantaine, la prévalence de l’infection à HPV est d’environ 10 %, celle des atypies koïlocytaires de 1 %, celle des CIN 3 de 0,1 % et celle du cancer invasif de 0,01 %.

À la ménopause, on observe dans certains pays une augmentation de la préva- lence de l’infection à HPV qui pourrait s’expliquer par les modifications hormo- nales et leur conséquence immunitaire, peut-être aussi par l’atrophie et le risque de microtraumatismes accrus favorisant la pénétration des HPV.

Le risque de développer un cancer du col durant la vie est estimé à 4 % dans les pays en voie de développement et à 1 % dans les pays développés.

Le rapport cancer/infection HPV est estimé à 1 pour 1 000 à 40 ans. Cependant,

en l’absence de dépistage, on peut penser que le rapport infection HPV/cancer du

(13)

Fig. 7a - Incidence des CIN 3 et du cancer invasif du col selon l’âge.

Fig. 7b - Les lésions de haut-grade surviennent à un âge relativement jeune.

Adapté de R. Peto et C.B. Woodman (42).

(14)

col serait de 10 à 50 fois plus important soit, en termes de relation directe, 1 can- cer pour 100 à 20 infections (1-5 %).

Tout ceci suggère que la majorité des infections à HPV, en particulier chez la jeune femme, sont transitoires mais que l’impact de l’infection à HPV sur le déve- loppement des néoplasies du col est fort.

Indicateurs pronostiques de l’infection à HPV à risque

Il y a une dizaine d’années des conceptions erronées sur l’infection à HPV ont pré- valu à la suite d’études utilisant des tests de détection, en particulier par PCR, très contestables sur leur performance. Ces rares publications ont laissé planer un cer- tain nombre d’idées fausses mais encore présentes dans l’esprit des professionnels.

Ainsi, il n’est pas rare de s’entendre observer que l’infection à HPV est très répan- due ou ubiquitaire en particulier pour les HPV à risque ou même que les HPV 6- 11 sont communément détectés dans les cancers du col et de fait, le potentiel carcinogène des HPV n’est pas établi. Ces différentes idées fausses dues à des tests inadéquats ont laissé planer le doute sur l’intérêt réel du typage viral en pratique clinique. Une partie seulement des femmes exposées aux HPV, en particulier dans la période de vulnérabilité du col (15-25 ans), ont un risque de développer un can- cer du col plus tard en l’absence de dépistage (rapport 1/100 à 1/20). Il apparaît clai- rement que toutes les femmes ne sont pas biologiquement et immunologiquement égales face à cette infection.

Plusieurs facteurs sont considérés comme des indicateurs pronostiques pour le développement synchrone ou métachrone de néoplasies cervicales. Les types viraux, l’âge, la persistance et la charge virale sont parmi les plus importants.

Âge

Le taux de détection de l’ADN des HPV est fortement lié à l’âge (21, 30, 31, 40, 41,

42) (fig. 8 et 9). Le pic de détection est observé entre 20 et 24 ans et après 35 ans les

taux sont de moins de 10 %. Pour les HPV à risque, la détection est marquée par les

mêmes fluctuations : moins de 10 % avant 25 ans, moins de 5 % après 35 ans et

moins de 2 % après 55 ans. Cela confirme que la majorité des infections à HPV et

en particulier les HPV à risque sont transitoires avant 35 ans et la proportion des

femmes concernées par cette infection après 35 ans sont celles qui ont une infection

persistante par les HPV à risque et pour lesquelles une lésion cervicale actuelle ou

future a une forte probabilité d’être détectée. Aussi, avant 35 ans, la prévalence éle-

vée (25 % HPV, 10 % HPV à risque) laisse supposer une valeur prédictive faible du

test HPV (évaluée à 20 % seulement) pour détecter une lésion sous-jacente. Après

55 ans, la faible prévalence de l’infection (4 % HPV, 2 % HPV à risque) indique une

valeur prédictive du test à détecter une lésion sous-jacente de l’ordre de 90 %. Enfin,

entre 35 et 55 ans avec une prévalence de 1’infection très modérée (10 % HPV, 5 %

HPV à risque), la valeur prédictive positive est de l’ordre de 70 %, ce qui est tout à

fait acceptable pour reconnaître l’intérêt du typage HPV comparé à d’autres tests de

détection.

(15)

Fig. 8 - Fréquence de l’infection à HPV, des CIN 3 et du cancer invasif selon l’âge.

Fig. 9 - Acquisition des papillomavirus selon les génotypes et l’âge.

Adapté de L. Ferlay (25).

Adapté de P.E. Castle (49).

Groupe d’âge

Le groupe d’âge est défini sur la base de l’âge à l’inclusion.

(16)

Type viral

Il est démontré que les femmes qui ont acquis des papillomavirus à risque (16 ou 18) ont un risque accru de développement de néoplasies cervicales comparées aux contrôles ou à celles qui ont été en contact avec d’autres types viraux. Sur une popu- lation de 1 662 femmes avec frottis normal suivies pendant 46 mois, Rozendaal et

al. ont montré que celles ayant été identifiés comme porteuses de HPV à risque

avaient un risque de développer une CIN 3 multiplié par 115 (43). L’infection à HPV à risque précédait le développement des CIN de haut grade. Par ailleurs, cer- tains variants d’HPV 16 ou 18 semblent conférer un risque accru par rapport à d’autres. Les types 16 et 18 sont les plus prévalents chez les femmes avec un frottis cervical normal en Europe, alors que des variations géographiques peuvent être observées en Asie ou en Afrique subéquatoriale (44). Alors que le type 16 ne repré- sente que 26,3 % des L-SIL et 45 % des H-SIL, selon une récente métaanalyse, le ratio HPV 16 cancer/L-SIL est de 2 (45), il est de 1,21 pour le ratio cancer/H-SIL (46). Plus récemment, il a été montré que le risque à 10 ans pour développer une CIN 3 ou un cancer est de 17,2 % pour l’infection à HPV 16 et de 13,6 % pour l’HPV 18 (47, 48). L’exposition est prédominante pour HPV 16 comparé aux autres types d’HPV à risque (49) (fig. 10).

Les études de prévalence indiquent que l’infection à HPV à risque est plus fré- quente, plus durable et plus souvent correlée aux comportements sexuels que celle des HPV à bas risque (50, 51, 52, 53).

Le fait que l’infection HPV à risque soit plus souvent corrélée au nombre de par- tenaires sexuels amène à penser que la transmissibilité sexuelle est plus fréquente que pour les HPV à bas risque dont la transmissibilité par contact non sexuel est connue. La prévalence plus marquée pour l’infection à HPV à risque chez l’homme peu aussi en être la cause.

Fig. 10 - Histoire naturelle du cancer du col.

(17)

Tableau IIIa - Persistance virale et risque lésionnel.

Persistance virale

Il a été démontré récemment que le risque relatif d’une association entre la persis- tance de l’infection à HPV et le développement d’une CIN est fortement corrélé à l’âge (> 35 ans) et au type de HPV ; la persistance avec les mêmes types de HPV à risque représentant le risque le plus élevé (54, 55, 56, 57, 58, 59, 60). Les mêmes observations ont été rapportées chez les femmes HIV + et sont susceptibles d’expli- quer l’incidence plus élevée de ces lésions dans cette population. Le risque de déve- lopper une lésion de haut grade est corrélé à la persistance de l’infection à HPV à risque alors que la régression est plus souvent corrélée à l’absence d’HPV à risque (tableau IIIa). Cependant il n’y a pas de consensus sur la définition exacte de la per- sistance et à partir de quel moment précis on peut affirmer la persistance virale. Le tableau IIIb montre bien que chez les femmes ayant une infection incidente ou pré- valente à HPV, âgées de 20 à 34 ans, le pourcentage de persistence diminue avec le temps et à 24 mois la persistence est inférieure à 20 %.

Tableau IIIb - Persistance de l’infection à HPV chez les femmes sans cancer du col.

OR -RR SIL / CIN

• V. Dalstein (2003)/JL Bory (2002)

• C. Meijer/M. Nobbenhuis (1999)

• G. HO (1998)

• E. Franco (1998)

• L. Koutsky (1992)

237 /CIN 2-3 327/CIN 3

37,2 /SIL 20,6/SIL 1 /CIN 2-3 OR Cx invasif

• K.L. Wallin/J. Dillner (1999) 16,4

Auteurs N° pts Âge

moyen Type d’infection

6 mois 12 mois 24 mois Woodman et al.

Moscicki et al.

Ho et al.

Ahdieh et al.(3) Sun et al.(3) Richardson et al.(3)

1075 618 608 439 231 635

20 ans 20 ans 20 ans 32 ans 34 ans 23 ans

Infections incidente(1) Infections prévalentes(2)

Infections incidentes(3) Incidentes et prévalentes Incidentes et prévalentes Infections incidentes(1)

24 % 50 % - 47 % 50 % -

4 % 30 % 30 % 36 % 35 % 62 %

<1 % 10 % 8 % 19 % 18 % -

% persistent à

(1)Seules les femmes HPV négatives ont été contrôlées.

(2)Seules les femmes HPV positives ont été contrôlées.

(3)La persistance est définie comme la détection du même type d’HPV lors de visites successives.

(18)

Pour Koutsky et al. (32), le risque relatif de développer une lésion de haut grade chez les femmes ayant un frottis normal et une positivité pour HPV 16 ou 18 est de onze, comparé aux femmes à frottis normal et négatives pour HPV. Ho et al. (54) ont observé un risque relatif de 37,2 pour la survenue d’une CIN chez les femmes présentant une infection persistante par un HPV à risque par rapport à celles né- gatives pour HPV à deux visites successives ; les facteurs de risque de persistance de l’infection à HPV pendant plus de six mois étaient la présence de HPV à risque à la visite précédente et l’infection avec plusieurs types viraux. Wallin et al. (61) ont démontré dans une étude prospective que l’infection persistante par un HPV à risque précède bien l’apparition du cancer invasif du col.

La persistance est prédominante pour HPV 16 comparée aux autres types vi- raux à risque (fig. 11).

La persistance élevée des CIN chez les femmes séropositives pour le VIH semble s’expliquer par un taux de persistance élevé de l’infection à HPV à risque dans cette population comparée aux femmes négatives pour le VIH (62).

Charge virale

Une charge virale élevée est un indicateur de CIN sous-jacente. Cuzick et al. ont montré qu’une charge HPV 16 élevée dans des frottis de dysplasie légère ont une valeur prédictive de 100 % à détecter une lésion de haut grade sous-jacente (63).

Alors que la sensibilité du frottis à détecter une lésion de haut grade est de 56 %, la détection d’un HPV 16 permet de révéler une lésion de haut grade sous-jacente dans 75 % des cas. La valeur prédictive positive pour les lésions de haut grade est de 35 % pour la cytologie et de 42 % pour les HPV à risque. Plus récemment Castle

Fig. 11 - Persistance des HPV selon les génotypes et groupes d’âge. Le groupe d’âge est défini sur la base de l’âge à l’inclusion.

Adapté de P. Castle (49).

(19)

(24) a montré sur un cohorte de 20 810 femmes suivies pendant dix ans qu’une charge virale semi-quantitative supérieure à 20 en hybride capture 2 augmentait le risque relatif de 2,7 à développer une lésion de CIN 3 ou un cancer.

Facteurs liés à l’hôte

Le rôle de l’immunité est étayé par les données sur le risque de CIN et de cancer du col chez les immunodéprimés (patients HIV +, transplantés sous immunosuppres- seurs). Le système HLA a certainement un rôle important dans le processus. C’est ainsi que des cofacteurs, qui pourraient être différents selon les régions géogra- phiques, seraient nécessaires pour la carcinogenèse. Des données épidémiologiques confirment que le comportement sexuel et l’immunodépression sont étroitement corrélés avec le risque de développement du cancer du col utérin.

Comportement sexuel

Le nombre de partenaires et l’âge au premier rapport sexuel sont en effet des fac- teurs déterminants de l’infection à HPV oncogène et a fortiori des lésions qui lui sont associées (14, 16, 17, 19, 53). Le risque de développer un cancer du col est trois fois plus important chez les femmes ayant dix partenaires différents, par rapport à celles ayant un seul partenaire. Les femmes ayant eu leur premier rapport avant l’âge de 16 ans présentent un risque deux fois plus élevé que celles dont le premier rap- port a eu lieu après l’âge de 20 ans. La fréquence des cancers cervicaux est égale- ment plus importante dans une population féminine dont les partenaires présentent des antécédents de lésions génitales ou de MST. La durée de contraception orale est associée à un risque accru de développement d’une néoplasie du col utérin. Les nombreuses grossesses, du fait des modifications hormonales, immunologiques et des traumatismes à l’accouchement, augmenteraient le risque de développement d’un cancer cervical. Enfin, l’incidence du cancer du col utérin est remarquable- ment faible dans les pays musulmans et les cancers péniens sont quasi absents. Ceci a été attribué en partie à la circoncision.

Statut immunitaire

La perturbation des défenses immunitaires locale et générale est considérée comme l’un des cofacteurs endogènes majeurs impliqués dans la carcinogenèse cervicale (64). En effet, la prévalence des infections génitales à HPV oncogènes et des lésions cervicales qui leur sont associées est très augmentée chez les sujets transplantés ré- naux et/ou dialysés par rapport aux sujets immunocompétents. Dans cette popula- tion, un dépistage précurseur des lésions est préconisé par frottis semestriel et par colposcopie annuelle.

Chez des femmes infectées par le VIH, la prévalence des infections à HPV est

également accrue et ce par défaut de clairance virale qui favorise la persistance de

l’infection. Les lésions associées à HPV apparaissent plus précocément chez les

femmes VIH + que chez les femmes immunocompétentes, elles progressent plus

(20)

rapidement vers une HGSIL, voire un cancer invasif, et récidivent également plus fréquemment après traitement.

L’infection à HPV est considérée comme une infection opportuniste chez les pa- tientes VIH+. L’association VIH et HPV a d’ailleurs conduit les CDC (Centers for

Disease Control) aux États-Unis à ajouter le cancer invasif du col utérin à la liste des

maladies SIDA. Cependant depuis que les traitements antirétroviraux sont prescrits et la restauration immunitaire qui s’en suit, l’infection à HPV semble moins agres- sive que par le passé.

Autres facteurs (64)

Prédispositions génétiques

Le développement de cancers cervicaux peut être associé à l’expression d’haplotypes HLA particuliers. L’allèle DQB1*0301 seul ou combiné avec DRB1*0401 est associé au cancer du col utérin ; à l’inverse, DRB1*1501 seul ou associé à DQB1*0602 n’est pas significativement augmenté dans le cancer ; l’allèle DQB1*0501 aurait un effet protecteur.

Tabac

Le tabagisme comme cofacteur dans l’évolution des lésions cervicales n’est pas ac- cepté par tous les auteurs. Cependant, quelques études récentes montrent que le ta- bac augmente le risque de développer une CIN 2/3 avec un effet-dose dépendant du nombre de cigarettes.

Facteurs diététiques

Des études ont souligné que les fruits et légumes riches en vitamine C, folates ou caroténoïdes, auraient un effet protecteur et favoriseraient la régression des lésions de bas grade. En revanche, un déficit en vitamine A favoriserait le développement des lésions intraépithéliales.

Facteurs sociodémographiques

L’appartenance à une classe sociale défavorisée, un faible niveau d’éducation contri- buent au risque de développer un cancer du col utérin. Ceci est souvent associé à un déficit nutritionnel, à de nombreuses naissances, à des infections génitales inter- currentes et à un accès limité au dépistage.

Carcinogènes environnementaux

Au Honduras, l’étude de Ferrera a confirmé que les femmes infectées par HPV et exposées au monoxyde de carbone, aux hydrocarbures polycycliques libérés par la combustion du bois de chauffage présentaient un risque très élevé de développer un cancer invasif (OR : 6,35).

En définitive, s’il est clairement démontré à l’heure actuelle que les HPV onco-

gènes sont les facteurs de risque indépendants du cancer du col de l’utérus, le fait

qu’une minorité de femmes infectées soit susceptible de développer un cancer in-

dique que les HPV ne sont pas suffisants.

(21)

Tableau IV - Classification OMS 2003.

Histoire naturelle de l’infection à HPV et des CIN

Histoire naturelle des CIN

Une revue complète sur les aspects moléculaires de l’histoire naturelle de l’infection à HPV a été rapportée (65).

La terminologie des CIN et leur corrélation avec les HPV est rapportée au ta- bleau IV.

Lors de l’examen histologique des cancers infiltrants du col utérin, les patholo- gistes du début du siècle dernier ont constaté la présence de lésions tumorales non infiltrantes, sans rupture de la lame basale, à proximité des lésions cancéreuses in- vasives. Elles ont été appelées « cancer in situ » et la théorie retenue à l’époque, et toujours admise actuellement, était que ces lésions précédaient l’invasion tumorale.

De plus, dans de nombreux cas, on observe des CIN 1 et des CIN 2 au voisinage des cancers in situ ou CIN 3. De ce fait, la séquence longtemps proposée dans l’histoire naturelle des carcinomes épidermoïdes du col utérin est la suivante :

Métaplasie malpighienne ➞ CIN 1 ➞ CIN 2 ➞ CIN 3 (ou carcinome in situ)

➞ Cancer infiltrant.

Cette « histoire naturelle » de la genèse des lésions cervicales a permis un dépis- tage des lésions précoces et une diminution très importante de la mortalité due au cancer du col dans les populations dépistées, grâce à des traitements précoces, mais peut-être parfois abusifs.

L’idée que le cancer in situ précède le cancer infiltrant est devenue un paradigme qui justifie le traitement systématique de ces lésions et il est devenu maintenant

Lésions bénignes : condylome acuminé Condylome plan

CIN

CIN 1 (dysplasie légère) CIN 2 (dysplasie modérée) CIN 3 (dysplasie sévère/CIS) Carcinome épidermoïde microinvasif Carcinome épidermoïde invasif

HPV bas risque

HPV bas ou haut risque

HPV haut risque

CIN bas grade

CIN haut grade

(22)

contraire à toute éthique de laisser évoluer ce type de carcinome in situ afin de tes- ter une hypothèse inverse. Cependant, nous n’avons pas actuellement d’idée très précise sur le risque réel de progression des cancers in situ vers le cancer infiltrant.

De petites séries de patientes « négligées » ont montré que le cancer in situ pouvait régresser spontanément dans 10 à 30 % et qu’il progressait réellement vers l’inva- sion tumorale dans 12 à 70 % des cas (66).

La progression du CIN 1 vers le CIN 3 puis vers le cancer infiltrant est large- ment admise. Cependant, il y a des discordances importantes entre les études éva- luant l’évolutivité des lésions dues principalement à des modes d’évaluation du suivi différents. La plupart des études considèrent que 10 à 15 % des CIN 1 non traités vont se transformer ensuite en CIN 2-3. Au moins 60 % des CIN 1 vont régresser spontanément et environ 30 % vont persister (66, 67, 68). Le risque de progression d’un CIN 1 vers un CIN 3 ou une lésion plus grave a été évalué à 1 % par an, alors que le risque de progression d’un CIN 2 vers une lésion plus marquée était de 16 % à 2 ans et de 25 % à 5 ans (69). En fait, le pourcentage de régressions est sûrement plus élevé si l’on considère les femmes avec un seul frottis montrant des lésions de bas grade au départ. Dans leurs travaux princeps, Barron et Richart (70, 71) ont considéré que 50 % des CIN 1 développaient un CIN 3 dans les 5 ans. Ce travail a servi de base pour la conduite à tenir devant les CINs depuis plus de 30 ans. En fait, Barron et Richart ont fait leur étude à partir d’une population sélectionnée de CIN 1 persistant depuis environ 2 à 3 ans, ce qui entraîne un biais non négligeable quand on sait que la plupart des CIN 1 régressent spontanément dans les deux premières années qui suivent le diagnostic. Or, comme on l’a vu, les chiffres de la littérature ne vont pas tous dans ce sens et on doit considérer les CIN 1 avant tout comme des lésions strictement bénignes avec un potentiel d’évolution vers une lésion de haut grade ou un cancer in situ très limité. L’histoire naturelle des CIN 1 est en général parallèle à l’histoire naturelle des infections à HPV. Il n’est pas justifié de traiter sys- tématiquement ces lésions qui vont régresser spontanément pour la plupart.

Histoire naturelle de l’infection à HPV à risque

Durant les années 1960 à 1970, les données épidémiologiques montrent que la

maladie est transmise par contact sexuel et inspirent la recherche pour identifier un

agent microbien comme facteur étiologique des néoplasies cervicales. À cette

époque, les données disponibles indiquaient que l’infection génitale avec le virus

herpès simplex (HSV) était probablement le coupable. Bien que ces virus aient

montré leur rôle carcinogénétique in vitro et in vivo, le lien avec le cancer du col

n’était qu’indirect. Dans les années 1980, l’attention s’est portée progressivement

vers un nouveau candidat, l’HPV, avec l’émergence de fortes évidences issues de la

biologie moléculaire impliquant certains types de virus comme agents responsables

de la transformation. Le risque relatif de l’association entre l’HPV et le cancer du col

est de deux à trois fois supérieur comparé aux autres facteurs de risque puissants de

cancer. En 1995, l’IARC classe les HPV 16 et 18 comme des agents carcinogènes chez

les humains (72). Cependant l’infection à papillomavirus est relativement fréquente

dans la population générale. On estime qu’environ sept femmes sur dix ont été

(23)

exposées au moins une fois durant leur vie aux HPV. On admet que sans interven- tion une femme sur cinq exposée aux HPV peut développer un cancer du col.

L’exposition à ces virus se fait par contact sexuel chez la femme jeune souvent lors des premiers rapports (14, 16, 17, 18). La prévalence de l’infection avant 30 ans est estimée à 30 % en moyenne. Elle diminue progressivement avec l’âge pour atteindre une moyenne de 10 % entre 30 et 50 ans et 5 % au-delà de 50 ans (fig. 1) (29, 30).

Les types 16 et 18 sont les plus prévalents chez les femmes avec un frottis cervical normal en Europe, alors que des variations géographiques peuvent être observées en Asie ou en Afrique subéquatoriale (44). Alors que le type 16 ne représente que 26,3 % des L-SIL et 45 % des H-SIL, selon une récente métaanalyse, le ratio HPV 16 cancer/L-SIL est de 2 (45), il est de 1,21 pour le ratio cancer/H-SIL (46). Plus récem- ment, il a été montré que le risque à 10 ans de développer une CIN 3 ou un cancer est de 17,2 % pour l’infection à HPV 16 et de 13,6 % pour l’HPV 18 (47).

L’exposition et la persistance sont les plus prédominantes pour HPV 16 comparé aux autres types d’HPV à risque (49). Toutes ces données confortent le rationnel pour une vaccination préventive contre les HPV 16 et 18. La majorité des femmes exposées aux HPV développent une immunité naturelle liminale pour en échapper.

Cette « clearance » des HPV est observée en général dans un délai de 9 à 12 mois (33, 73, 74). Un nombre limité de femmes garderont les papillomavirus « latents ou quiescents » durant des mois voire des années. Elles peuvent alors développer en cas de persistance de l’infection une lésion intraépithéliale, qui, non détectée, pourrait aboutir à un cancer des années plus tard si le dépistage n’est pas réalisé ou a échoué (57, 58, 59, 60, 61) (tableau I).

Mécanisme de la carcinogenèse

L’environnement biologique des cellules infectées par les HPV à risque est détermi- nant dans l’expression ou non des gènes viraux transformants. Dans cet environ- nement biologique très particulier, il faudra encore des recherches moléculaires sur toute une série de cofacteurs exogènes ou endogènes (dont les facteurs hormonaux et immunitaires) pour comprendre les mécanismes d’interaction entre la cellule hôte, son génome et les gènes transformants des HPV à risque (fig. 12).

L’acquisition sexuelle des HPV est l’élément déterminant observé le plus sou- vent lors des premiers rapports. En effet la prévalence et l’incidence des HPV sont particulièrement élevées chez la jeune femme sexuellement active et sont propor- tionnelles au nombre de partenaires sexuels.

Le caractère d’intermittence, de résurgence, de forme transitoire ou persistante

de l’infection à HPV est l’une des caractéristiques de cette infection. Quatre facteurs

de risque importants conditionnent par la suite l’apparition d’une dysplasie : les

types viraux (HPV 16-18), le nombre de copies d’ADN viral (charge virale), la ré-

ponse immunologique de l’hôte face aux protéines virales impliquées dans l’expres-

sion des lésions et enfin les facteurs d’environnement que sont les hormones et le

tabac essentiellement.

(24)

Fig. 12 - Expression des gènes viraux.

Au départ, les gènes E6-E7 sont réprimés par le contrôle intra- et intercellulaire (fig. 12, 13a, 13b, 14). Certains sujets développent des lésions purement virales ap- pelées condylomes plans ou lésions cervicales de bas grade (dysplasie légère). Dans ce type de lésions, les HPV de type 16 arrivent à maturation et leur génome est tou- jours extrachromosomique ; ce sont surtout les gènes viraux impliqués dans la syn- thèse de la capside qui sont exprimés (ORF L1-L2) dans les couches différenciées de l’épithélium malpighien. À ce stade, les protéines E6-E7 sont produites en pe- tites quantités, permettant leur reconnaissance antigénique et leur contrôle. Lorsque la lésion devient une lésion de haut grade (dysplasie sévère ou carcinome in situ), on assiste progressivement à l’expression des gènes viraux E6-E7 mais les virus, dont l’ADN est toujours extrachromosomique, n’arrivent pas à maturation ; ils se trou- vent le plus souvent à l’état épisomal (immature). À ce stade, le contrôle intercellu- laire (macrophages, immunité à médiation cellulaire) de la transcription des gènes E6-E7 est perturbé.

Il s’agit là de lésions à risque dont les caractéristiques rappellent la croissance

des cellules immortalisées in vitro. Cette immortalisation doit être assimilée, en réa-

lité, aux lésions avec instabilité génique. Celle-ci est d’ailleurs objectivée par l’aneu-

ploïdie, qui est classiquement observée dans 90 % de ces lésions à risque. La

production insuffisante des molécules spécifiques du Complexe Majeur

d’Histocompatibilité (CMH) ou le défaut de présentation des peptides E6-E7 en-

traînent un niveau de synthèse élevé des protéines E6-E7. Au fur et à mesure que

les gènes E6-E7 sont exprimés en quantité importante, ils fixent à la longue les pro-

téines pRB et p53 et bloquent ainsi la fonction suppressive de la transformation ;

(25)

Fig. 13a - Comment l’intégration augmente le risque de transformation.

Fig. 13b - Comment l’intégration augmente le risque de cancer.

Adapté de J. Monsonego (65).

Adapté de J. Monsonego (65).

(26)

Fig. 14 - Impact des cofacteurs sur la carcinogenèse du col utérin.

c’est alors qu’on constate l’intégration de l’ADN viral des HPV dits à risque au gé- nome des cellules hôtes et ce phénomène est toujours associé à la cancérisation.

Lorsque la lésion invasive devient agressive et se généralise, on a pu penser qu’une mutation des gènes p53 et pRB s’était produite, le plus souvent en l’absence d’HPV, mais cela n’est plus confirmé aujourd’hui. Les mutations sont observées dans les cancers tant négatifs que positifs pour les HPV. Au stade des lésions précancéreuses, certains cofacteurs contribuent à l’amplification de l’ADN des HPV (hormones, etc.). Les facteurs immunologiques et le système HLA peuvent expliquer les régres- sions ou la stabilité de certaines lésions.

Dans certains cas, l’ADN viral ne se réplique pas, ne s’intègre pas. On parle d’in- fections latentes asymptomatiques qui ne conduisent à aucune anomalie cytolo- gique ou colposcopique. Ces infections latentes constituent des réservoirs viraux à partir desquels les HPV peuvent reprendre leur cycle de réplication suite à un évé- nement extérieur (immunosuppression par exemple), s’intégrer et provoquer des lésions du col utérin.

La figure 14 illustre l’impact des cofacteurs sur la carcinogenése du col utérin.

Le tableau VI récapitule les données cliniques et biologiques des lésions cervi- cales à HPV.

Pour conclure, retenons que le processus de transformation des cancers du col

utérin positifs pour HPV requiert l’expression de gènes viraux spécifiques et que

celle-ci n’est habituellement observée qu’après une longue période, suggérant des

interactions biologiques complexes et individuelles entre l’ADN viral et le génome

cellulaire.

(27)

Tableau VI - Aspects cliniques, biologiques des néoplasies cervicales.

CIN 2-3 Cancer du col Condylomes

acuminés

ADN HPV 16-18

les plus fréquents.

16-18

les plus fréquents. 6-11

Colposcopie Anomalies de la zone de transformation.

Vaisseaux atypiques, ulcérations, bourgeonnements.

Prolifération régulière sans nécrose.

Histologie

Hyperplasie intraépithéliale, mitoses atypiques, koïlocytose en surface.

Infiltration du stroma par le processus néoplasique, koïlocytose en surface.

Koïlocytose, multinucléation, parakératose papillomatose.

Absence de mitose atypique.

ADN ploïdie Aneuploïdie (50-80 %).

Aneuploïdie (-95 %).

Diploïdie (-80 %).

État de l’ADN viral

Épisomal (++) dans les cellules basales et intermédiaires, virions en surface.

Intégré au génome des cellules tumorales.

Virions dans les cellules différenciées.

Expression des gènes viraux

E6-E7 (+) dans les cellules basales indifférenciées.

E1-E2-E4-E5 (+) L1-L2 (+) dans les cellules différenciées.

E6-E7 (+++) dans les cellules tumorales.

E2 (-) L1-L2 (-)

L1-L2 (+++) dans les cellules différenciées.

E6-E7-E2-E1 dans les cellules différenciées.

Liaison avec les protéines des gènes suppresseurs (p53-pRb)

Rare

dans les cellules indifférenciées (hybridation in situ).

Constante dans les cellules cancéreuses de E6 et de E7 avec p53 et pRb respectivement

Absence ou non spécifique.

Contrôle de l’expression des protéines E6-E7

Macrophages Immunité à médiation cellulaire.

Défaut de présentation des antigènes viraux au système MHC.

Immunité à médiation cellulaire.

(+) : présence. (–) : absence.

(28)

Réponses immunitaires anti-HPV

La particularité des HPV est d’avoir pour cible les kératinocytes basaux des épithé- liums malpighiens kératinisés ou non (fig. 15). Leur pénétration dans les kératino- cytes se fait grâce à des récepteurs qui leur sont propres, bien identifiés pour certains HPV (comme l’intégrine 6 pour HPV 6), moins bien identifiés pour d’autres (comme les glycosaminoglycanes, syndécane-1, héparanes sulfates pour HPV 16).

Les antigènes viraux, après leur pénétration dans le kératinocyte, peuvent alors être présentés à la surface de ces cellules sous forme de peptides de petite taille (8 à 11 acides aminés), en association avec les molécules HLA de classe I ou de peptides de plus grande taille (13 à 25 acides aminés), en association avec les molécules HLA de classe II présentes sur les kératinocytes infectés.

La stimulation du système immunitaire lymphocytaire T initialement naïf vis- à-vis des HPV passe obligatoirement par une présentation de l’antigène aux lym- phocytes T, par des cellules présentatrices professionnelles de l’antigène de la lignée des cellules dendritiques (CD) incluant les cellules de Langerhans présentes dans les épithéliums malpighiens (fig. 16). Les cellules de Langerhans ont la propriété de pouvoir fixer les particules virales entières grâce aux récepteurs aux HPV qu’elles présentent à leur surface (75). Elles ont aussi la propriété d’internaliser des parti- cules virales, comme cela a été montré in vitro pour les cellules dendritiques et les particules virales vides. Les cellules de Langerhans ont ensuite la capacité de pou- voir migrer vers les organes lymphoïdes drainant les sites concernés et transportent alors soit des particules virales entières soit des corps apoptotiques de kératinocytes.

Les cellules de Langerhans, après avoir capté l’antigène, subissent des transforma-

tions et l’expression de CCR 7 à leur surface leur permet de migrer sous l’attraction

de la chimiokine MIP-3 bêta (77). Une fois dans ces organes lymphoïdes, les cel-

lules de Langerhans elles-mêmes ou bien via d’autres cellules dendritiques présen-

tent les antigènes à la fois aux lymphocytes T CD4 + et T CD8 +. Les lymphocytes T

ainsi stimulés acquièrent la propriété à leur tour, via un jeu de synthèse de chimio-

kines et d’expression de molécules de surface, de migrer grâce à la circulation san-

guine cette fois, vers les épithéliums infectés et d’aller au contact des kératinocytes

infectés. Le rôle des lymphocytes T dans l’élimination des kératinocytes infectés,

même s’il n’a pas encore été démontré de façon formelle, est de détruire ces kéra-

tinocytes soit par cytotoxicité directe soit par l’interaction de la molécule Fas-L pré-

sente sur les lymphocytes T et de la molécule Fas présente sur les kératinocytes infectés

ou tumoraux soit encore grâce à la synthèse par les lymphocytes T de cytokines comme

le TNF. La reconnaissance des kératinocytes infectés par les lymphocytes T activés est

favorisée par la synthèse d’IFN qui permet d’augmenter l’expression de molécules

HLA de classe I et II à la surface des kératinocytes. On comprend, à partir de ces mé-

canismes, que les lymphocytes T ont parfois des difficultés à être stimulés par les an-

tigènes viraux et surtout la difficulté de mettre en évidence cette réponse immunitaire

in vitro à partir des lymphocytes périphériques circulants.

(29)

Fig. 15 - Pénétration des antigènes viraux.

Fig. 16 - Réponses immunitaires à l’HPV.

(30)

L’immunité à médiation cellulaire joue un rôle très important dans le contrôle des infections à HPV de bas et de haut risque. En effet, l’examen anatomopatholo- gique de condylomes régressifs (78) a montré un infiltrat des lésions composé de lym- phocytes T. Les immunomarquages pratiqués montrent qu’il s’agit de lymphocytes T CD4 + et CD8 + à la fois dans l’épithélium et dans le chorion. Par contre dans des lésions de haut grade non régressives, l’infiltrat CD4 + disparaît et seuls les CD8 + persistent (79).

Les études fonctionnelles des lymphocytes infiltrant les lésions sont difficiles à pra- tiquer et elles sont peu nombreuses. Quelques-unes ont été faites chez des malades présentant des cancers invasifs du col associés à HPV 16. Elles mettent en évidence des lymphocytes T CD8 + tueurs au sein des lésions (80) ainsi que des lymphocytes T CD4 + capables de synthétiser des cytokines comme le TNF α et l’IFNγ qui ont toutes deux une activité antitumorale. Chez des malades présentant des condylomes, une prolifération de lymphocytes T CD4 + a été mise en évidence à partir de biop- sies chez 18 malades parmi 24 (83). Ces lymphocytes T présentent un profil de type Th1 (synthèse d’IL2 et d’IFN γ). À l’opposé, les cytokines retrouvées in situ dans les lésions de haut grade sont en faveur d’une immunosuppression locale (IL10, TGFb).

Les réponses dans le sang sont également très difficiles à mettre en évidence au

cours des infections HPV. En effet, le pourcentage de lymphocytes T circulants spé-

cifiques d’HPV 16 chez des femmes infectées est extrêmement faible (1/1 250 à

1/20 000). Les études des réponses immunitaires cellulaires T CD8 + ont été faites

majoritairement à partir des lymphocytes du sang périphérique (PBMC) de femmes

ayant des CIN ou des cancers invasifs du col de l’utérus. Les antigènes viraux qui ont

été les plus étudiés sont les protéines E6 et E7 d’HPV 16 qui sont des antigènes vi-

raux exprimés précocement dans les lésions et de façon permanente dans les kérati-

nocytes tumoraux. Ainsi, chez des malades ayant des CIN liées à HPV 16, des CTL

CD8 + ont été trouvés chez un très faible pourcentage de malades : chez 1 malade

parmi les 11 testés ayant une CIN 2 (84), chez 3 parmi 10 malades ayant des CIN de

grade 1 à 3 (85), chez 2 parmi 11 malades ayant des CIN 3 (86). Les autres essais me-

nés à partir des PBMC de malades ayant un cancer invasif du col de l’utérus ont mis

en évidence des CTL chez 2 sur 11 malades (15), chez 4 malades sur 4 testées (87),

chez 4 malades sur 5 (80) et chez 11 malades sur 12 (88). Les réponses immunitaires

T CD4 + au cours de l’infection naturelle par HPV sont encore mal définies et assez

contradictoires selon les études. Elles sont le plus souvent mesurées après stimulation

des PBMC par de la protéine de capside L1 ou par des peptides synthétiques issus de

L1 ou encore de E6 et de E7. Au cours d’une étude longitudinale, des proliférations

positives vis-à-vis de peptides de E6 et de E7 d’HPV 16 ont été mises en évidence lors

de régression de lésions de CIN avec élimination d’HPV 16. Des intradermoréactions,

qui sont le reflet d’une réaction d’hypersensibilité retardée (réponse CD4 +), prati-

quées avec cinq longs peptides de E7, ont été positives chez 8 parmi 11 femmes ayant

une CIN régressive, chez 2 malades parmi 30 ayant des CIN progressives et chez au-

cune des 7 malades avec un cancer invasif (90). Ces résultats suggèrent une activité

CD4 + fondamentale pour la régression des lésions.

(31)

Fig. 17 - Réponses immunitaires aux HPV : synthèse.

Les figures 17, 18, 19 et le tableau VII résument les mécanismes immuns de l’in- fection à HPV.

En conclusion, la réponse lymphocytaire T CD4 + semble être davantage présente au cours des infections asymptomatiques, des lésions de bas grade ou au cours des CIN 3 et disparaît lors de l’évolution vers le cancer invasif. Cette faible activité des lymphocytes périphériques pourrait être due à une cinétique non concordante des prélèvements par rapport aux régressions des lésions. Une anergie des lymphocytes T effecteurs en rapport avec une synthèse et une sécrétion par la tumeur de cytokines suppressives comme le TGFb ou l’IL-10 pourrait également être en cause.

Il est également difficile au cours des infections à HPV extensives et persistantes de savoir si, après l’infection virale, l’absence d’élimination du virus est liée à une anomalie primitive des réponses immunitaires cellulaires ou bien si ce déficit est se- condaire, généré par la présence même du virus. In fine cependant, les anomalies des réponses immunitaires cellulaires empêchent l’élimination des HPV cutanéo- muqueux et favorisent sa persistance.

En conclusion, le développement de lésions précancéreuses du col est le témoin d’un échappement immunitaire face aux papillomavirus, qui est propre à chacun, celui-ci est plus marqué pour les HPV 16 et 18. La majorité des infections à HPV de la jeune femme de moins de 30 ans est donc transitoire alors que celles observées après l’âge de 30 ans sont plus souvent persistantes et peuvent aboutir à des lésions.

Les types 16 et 18 sont plus souvent persistants que les autres types viraux. Ainsi la présence instantanée des HPV au niveau du col ne signifie pas la présence d’une lé- sion, il peut s’agir aussi d’un portage silencieux.

γ

Adapté de S. Tyring.

(32)

Fig. 18 - Réponse immune aux HPV.

À l’inverse, il est clairement démontré que la persistance de l’ADN viral au-delà

de 12 ou 18 mois d’intervalle est un bon indicateur lésionnel actuel ou futur. Ce phé-

nomène est plus marqué pour l’infection HPV 16 et 18. Le risque relatif de dévelop-

per une lésion des années plus tard est évalué de 11 à 350. Cette persistance virale se

traduit par l’expression de certains gènes viraux, en particulier les gènes E6 et E7 des

HPV à risque seulement, dont le rôle dans l’immortalisation des cellules est démon-

tré par leur action sur les protéines inhibitrices du cycle cellulaire. La liaison spéci-

fique de la protéine E7 à des produits du gène inhibiteur du cycle cellulaire pRB est

responsable de la prolifération cellulaire. La liaison de la protéine E6 à la protéine p53

dégrade cette dernière, entraînant un dysfonctionnement dans le processus d’apop-

tose.

(33)

Fig. 19 - Réponses immunes aux HPV.

Tableau VII - Immunité spécifique aux HPV.

Conclusion. Différences fondamentales entre l’infection à HPV à bas risque et à haut risque

Pour conclure ce chapitre sur l’infection à papillomavirus, il est capital que le clini- cien comprenne les différences fondamentales entre l’infection à papillomavirus à bas risque et à haut risque, tant sur le plan épidémiologique, morphologique, cli- nique, immunologique qu’oncogénique. Le tableau VIII résume de façon didactique les éléments les plus caractéristiques de cette différence.

Immunité

humorale Immunité à médiation cellulaire

Peut être mesurée Difficile à évaluer Essentiellement contre

L1 E6 et E7 sont les cibles principales Bloque la pénétration

des virus dans l’éphithélium

- impliquée dans l’élimination naturelle des virus oncogènes - l’infection subclinique peut persister

(34)

Caractéristiques HPV à bas risque HPV à haut risque

Manifestations cliniques Condylomes Acuminés (CA) Néoplasies intraépithéliales Cancer

Transmission Contact sexuel Contact sexuel

Contact non sexuel

Cibles le plus souvent 15-25 ans 20-70 ans

concernées pour les lésions

Pic de prévalence 24 ans 25 ans 25 ans 35 ans 45 ans

Infection/Maladie (HPV) (CA) (HPV) (CIN 3) (cancer)

Délai moyen 2 à 8 mois 18 mois-5 ans 15-20 ans

d’apparition des lésions (CIN 3) (cancer)

après exposition aux virus

Transmissibilité virale Forte Faible

Expression clinique Condylomes Acuminés Néoplasies intraépithéliales (NIE) Génitaux (hommes-femmes) (femmes) – (5 % des hommes - Multifocaux-Pluricentriques concernés)

- Sites : vulve et périnée++, - Site privilégié ZT col = CIN anus, vagin-col - VaIN ; VuIN ; AIN plus rares

Particularités - Extension - association IST Unifocale CIN 1-2-3 +++

- Récidives 30 % Rarement multifocale - Traitements multiples Traitements efficaces sur le col : d’efficacité relative (réponse taux de succès après : complète à 1 an 50-70 %) - traitement destructeur 90 % - 20 % persistent après - traitement exérèse 95 % 1 an de traitement

Oncogéniques NON OUI

Immunologiques Immunité naturelle très peu Immunité naturelle meilleure protectrice, échappement

immunitaire

Risque lésionnel • 50 % des sujets développent des • 80 % des sujets exposés

après contact CA après contacts éliminent le virus spontanément

(infection transitoire)

• 20 % sont des infections persistantes.

• Dans un délai • 20 % pour les CIN 3 dans inférieur ou égal à 8 mois un délai de 5 à 10 ans.

• 5 % pour les cancers du col dans un délai de 15 à 20 ans et sans intervention de dépistage.

• 1 % pour les cancers avec intervention de dépistage.

ÉpidémiologiquesCliniques

Tableau VIII - Différences fondamentales entre l’infection à HPV à bas risque et à haut risque.

CA : Condylomes Acuminés. NIE : Néoplasies IntraEpithéliales.

ZT : Zone de Transformation. IST : Infections Sexuellements Transmissibles.

Riferimenti

Documenti correlati

Ces opportunités peuvent être offertes par des conditions individuelles (plus de temps libre, de meilleures conditions économiques et éducationnelles, des réseaux sociaux

To confirm and integrate the results obtained by the analysis of SSR markers, we took advantage of available GBS-derived SNP data points for only 40 grapevine samples, including

I saggi raccolti in questo volume – che testimoniano la collaborazione tra due sezioni AIS: “Sociologia della Salute e Medicina” e “Studi di Genere” – affrontano, attraverso

Dans ce cas, le laser CO 2 permet de contrôler de manière précise la profondeur de destruction des lésions (7 à 8 mm), de traiter avec un liseré de sécurité périphérique

Le diagnostic des condylomes acuminés génitaux (CAG) externes typiques étant avant tout clinique, leur traitement doit être précédé d’un interrogatoire précis.. Afin de

In generale, se si eccettua la documentazione su Montosolo inserita negli ultimi due decenni del Duecento, si può notare che dal Libro Rosso non traspaiono pratiche

Depuis plusieurs années, l'attention publique est appelée sur les dangers que présentent pour la santé des ouvriers les fabriques d'allumettes chimiques.. Ces

L’originalité, la pérennité, la large diffusion de ce mythe de l’île aux femmes, de l’arbre anthropogène et des femmes-fruits ont donc semblé offrir l’occasion d’attirer