Spécificités de la main du sujet âgé
Y. Saint-Cast
Avec l’âge, surtout à partir de la septième décennie, le revêtement cutané de la main perd son élasticité, devient plus fin, sec et fragile (1, 2). La flaccidité de la peau, en augmentant la surface de l’enveloppe tégumentaire, peut consti- tuer un réel avantage pour la réalisation des lambeaux, à condition de s’adapter à la finesse et à la fragilité de la peau.
a b
c d
e f
Fig. 1a-f – Troisième récidive d’un sarcome de bas grade chez une femme de 72 ans.
Reconstruction en un seul temps sous bloc brachial, après exérèse compartimentale (a, b). Le bord radial de la main a été recouvert par un lambeau interosseux postérieur, dont le drainage veineux a été amélioré par une anastomose veineuse, afin d’éviter une turgescence du lambeau ; le pouce a été reconstruit par pollicisation du quatrième doigt (c-e). Résultat à distance (f).
258 Couverture des pertes de substance cutanée de la main et des doigts
Sur le plan fonctionnel, préserver la capture manuelle est un objectif prio- ritaire, d’autant qu’une altération d’acuité visuelle peut s’associer, rendant encore plus précieuses les capacités tactiles de la main. L’âge semble en effet peu altérer l’innervation de la peau (3).
Techniquement, il faut exploiter les modifications tégumentaires (finesse et excédent), en privilégiant les lambeaux locaux qui peuvent couvrir plus lar- gement que chez l’adulte jeune. Tous les autres types de lambeaux, notam- ment les lambeaux en îlot ou libres, sont possibles pour peu que l’on respecte la texture fine et dissociable des différents éléments qui font l’épaisseur du lambeau (figs. 1, 2). Pratiquement toutes les pertes de substance peuvent être traitées sous anesthésie locorégionale.
Lors de la réhabilitation fonctionnelle, il faut veiller à maintenir une bonne hydratation pour lutter contre la sécheresse de la peau (4) et se méfier des massages trop vigoureux.
En conclusion, les sujets âgés peuvent bénéficier des progrès thérapeutiques dans les pertes de substance cutanée. Ils méritent que l’on prenne du temps, à toutes les étapes de la prise en charge : lors de la décision chirurgicale, en
Fig. 2a-e – Amputation de la pulpe chez un patient de 70 ans (a, b). Reconstruction par lambeau prélevé sur la face dorsale du majeur (c). Notez l’artifice de la résection de l’épo- nychium pour augmenter la surface visible de la tablette unguéale (b). Comme pour le sujet jeune, le lambeau a été sevré au quinzième jour. Résultat à distance (d, e).
a b
c d
e
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différant au besoin l’acte chirurgical afin de mieux apprécier l’état physiolo- gique et les ambitions fonctionnelles ; lors de la réalisation technique afin de préserver des structures fragiles ; lors de la réhabilitation fonctionnelle en s’in- vestissant dans le suivi et l’acquisition des objectifs. Ces conditions étant réunies, on ne sera que rarement déçu d’une prise en charge globale ambi- tieuse et exigeante.
Références
1. De Rigal J, Escoffier C, Quelieux B et al. (1989) Assessment of aging of the human skin by in vivo ultrasonic in aging. J Invest Dermatol 93: 621-5
2. Shuster S, Black MM (1975) The influence of age and sex on skin thickness, skin collagen and density. Br J Dermatol 93: 639-43
3. Lauria G, Holland N, Hauer P et al. (1999) Epidermal innervation: changes with aging, topographic location, and in sensory neuropathy. J Neurol Sci 164: 172-8
4. Potts RO, Buras EM, Chrisman DA (1984) Changes with age in the moisture content of human skin. J Invest Dermatol 82: 97-100