commune ? Une enquête dans les Alpes-Maritimes de Pinar Selek *
2. Citoyennes féministes et non-citoyennes : les difficultés d’une lutte commune
« Si tu n’as pas de papiers, tu n’as pas de vie. La seule solution, c’était la grève » disaient une centaine des travailleuses du nettoyage sans-papiers en grève, qui participaient aux actions médiatiques de sans-papiers, comme l’occupation des marches de l’Opéra Bastille durant près de trois semaines, à Paris et à Marseille, en 200825. « Dans les hôtels ACCOR : nettoyage rime encore avec esclavage ! » C’était le slogan de trente-cinq travailleuses du nettoyage qui, avec le soutien d’un comité intersyndical (SUD/CNT/CGT), ont continué leur grève pendant un an, en 2002. Pourtant, ces exemples restent minoritaires car la plupart des femmes sans papiers ne parviennent pas à se lier avec les syndicats ou avec les organisations contestataires.
Elles sont quasi absentes des déclarations des organisations solidaires gé-néralistes, dans les Alpes Maritimes ou en Ligurie, comme dans d’autres parties d’Europe occidentale. Si autour de la solidarité avec les personnes migrantes, on a pu observer une certaine convergence des organisations militantes, des deux côtés de la frontière, les quêteuses d’asile et leurs prob-lèmes spécifiques restent invisibles sur l’agenda militant franco-italien tout comme dans l’arène publique.
23. Extrait d’entretien avec Oumou, 28 ans, venue de Guinée, fait à Nice, le 22.11.2018.
24. Entretien effectué par Helena Maleno Garzon à Agadir, le 09/01/2018 (Garzon, 2018 : 16).
25. L’Humanité, « Le Monde est plein d’étrangers », par Marie Barbier et Dominique Sicot, 5 septembre 2008.
Qu’en est-il des groupes féministes de cette région transfrontalière ? Une rapide observation, du côté italien et français, suffit pour affirmer leur contribution aux activités quotidiennes de solidarité avec les personnes en migration. Cette présence n’est-elle pas en contradiction avec l’invisibilité des quêteuses d’asile ? Quelle est la place des groupes féministes dans la construction des schémas d’accueil ? Que font ces groupes pour porter dans l’espace public cette question spécifique ? Leur travail de solidarité avec les quêteuses d’asile crée-il des processus des réflexion ou de luttes collec-tives ? Au début de notre enquête, nous avons recherché les pratiques d’exclusion des quêteuses d’asile au sein des mouvements féministes des deux côtés de la frontière. C’est dans un deuxième temps que nous avons distingué la multiplicité des causes de l’inefficacité des mouvements fémin-istes face à cette question, mais aussi leur transformation dans le temps.
2.1. La question des ressources
Comme déjà indiqué, dans les régions transfrontalières de Ligurie et de la région PACA, on observe une participation féministe aux mouvements de solidarités avec les migrant.es découlant des convergences trans-frontalières entre de multiples groupes. Cette participation est plus im-portante que dans les régions qui ne sont pas directement impactées par la
« crise », donc par la militarisation, par la surveillance et par la visibilité des clandestin.es.
Ces militantes franco-italiennes témoignent de leurs débats, critiques, propositions, au sein de ces collectifs, pour rendre plus visibles les
« revendications spécifiques aux femmes et à toutes personnes non-conformes à l’ordre patriarcal »26. En avançant dans notre recherche, nous avons remarqué que depuis le début de la crise criminalisatrice, les fémin-istes impliquées dans les réseaux de solidarités se regroupent, après avoir été confrontés à l’universalisme qui ne priorise pas les situations spécifiques. N, jeune féministe française, engagée activement au sein d’associations solidaires entre Menton et Vintimille, raconte comment quelques femmes françaises et italiennes issues de ces associations diverses se sont regroupées autour de critiques semblables, depuis 2016, avant d’organiser, entre elles, des formes de solidarités spécifiques : « aller chercher les femmes où elles sont confinées ou bien les repérer sur les routes et les aider à continuer leur projets »27. Aujourd’hui, dans le réseau
26. Toutes aux frontières : la pétition | Toutes aux frontières (wordpress.com).
27. Extrait d’entretien avec T.N fait à Vintimille, le 2 février 2019.
transfrontalier de solidarité avec les migrant.es, les convergences entre les féministes se tissent tant au niveau individuel, qu’au niveau collectif. Il y a aussi des collaborations entre féministes travaillant dans des organisations généralistes avec des groupes féministes autonomes. Par exemple, N S. qui endosse, à Habitat & Citoyenneté, la plus grande partie des permanences-femmes, fait appel au GRAF28 ou au Planning familial 06 pour des cas spécifiques. Par ailleurs, certains groupes féministes autonomes, comme celui de T.N. créent clandestinement des circuits de solidarités avec les quêteuses d’asile afin de les protéger des réseaux mafieux : passage, hé-bergement, alimentation, besoins sanitaires, régularisation, travail…
L’engagement des féministes françaises et italiennes auprès des exilées in-visibles reste dans l’invisibilité, par une volonté politique : « La visibilité de ce travail peut mettre en danger les exilées qui sont déjà criminalisées, qui ne sont pas en sécurité et qui ne sont pas protégées par les pouvoirs publics » explique M.S, une autre militante dans un groupe autonome dans la région29.
Il faut prendre en compte que ce n’est pas dans cette région que les mouvements féministes italiens ou français sont les plus forts. Au contraire, dans les villes comme Menton, Breil, Tende, Sospel, Vintimille, Imperia, il y existe des petits groupes non-structurés. A Nice, cinquième ville de France, s’il existe, depuis les années 1960, divers regroupements fémin-istes, ceux-ci n’ont jamais pris d’ampleur. En dehors du Planning Familial (MPF) et de « Nous Toutes 06 », sections locales d’organisations nation-ales, il n’existe qu’un seul groupe féministe autogéré (GRAF) qui regroupe entre quinze et vingt femmes. La faiblesse ou le manque de ressources de ce mouvement dans la région a deux conséquences interdépendantes : une solidarité limitée et la mise à l’agenda d’autres priorités. Si dans la région, les féministes coopèrent avec des organisations solidaires ou organisent leurs propres solidarités « avec les femmes et avec toutes personnes non conformes à l’ordre patriarcal »30, celles-ci restent limitées par manque de ressources financières et humaines. Ceci nourrit également la question de la priorisation :
Nous faisons partie du mouvement féministe national…même si cette par-ticipation n’est pas toujours facile, nous participons aux décisions d’organiser des actions à l’échelle nationale et internationale, surtout les 8 mars et les 25 novembre. Mobiliser les femmes, réussir des rassemblements
28. Groupe Réflexions et Actions féministes.
29. Extrait d’entretien avec M.S fait à Menton, le 11. 12. 2019.
30. Appel Toutes aux frontières le 5 juin 2021 à NICE – Roya Citoyenne (roya-citoyenne.fr).
ne sont pas des tâches faciles ! Surtout dans cette région touristique ! (Ex-trait d’entretien avec Colette Mô, fait à Nice, le 19.12.2018).
Donc, réussir ces quelques actions, comme la « Grève féministe », écrites dans l’agenda international, devient une priorité existentielle pour les groupes des deux côtés de la frontière. Pourtant, depuis 2018, une autre priorité émerge dans l’espace féministe PACA-Ligurie : les politiques eu-ropéennes de frontiérisation. Ce sujet qui n’est pas porté en priorité par les mouvements nationaux, prend de l’ampleur dans cette région.
2.2. Travail social et domination : ne pas s’enfermer
Les caractéristiques sociales des militantes de ces groupes contribuent à façonner le manque de ressources. En général ces petits groupes autogérés qui s’engagent dans la solidarité avec les femmes quêteuses d’asile mobi-lisent de jeunes étudiantes ou travailleuses précaires ou en chômage qui consacrent une grande partie de leur temps aux études ou à la survie. Le manque de temps s’ajoute alors au manque de ressources logistiques et lim-ite de façon significative leur activité de soutien aux quêteuses d’asile qui ont des besoins vitaux. « Toujours des besoins urgents. Ça ne finit jamais.
L’une finit, l’autre commence. Les politiques de non-accueil nous oblige à remplir le vide mais le vide est trop gros et nous sommes trop petits »31. Toutes les autres enquêtées nous ont parlé du grand écart entre le peu de ressources et l’ampleur des besoins vitaux des quêteuses d’asile.
Malgré cet écart, les politiques de non-accueil des pouvoirs publics dans ces deux pays contraignent les groupes féministes, comme les autres groupes solidaires, à assumer un rôle de services sociaux qui demande un
« travail de fourmis sans arrêt, sans pouvoir prendre le temps pour créer des vrais liens avec les exilées »32. Si nous avons observé quelques cas faisant exception, en général, le travail de solidarité avec les femmes étrangères, sans situation administrative régulière et sans ressources économiques, con-traint ces jeunes féministes avec peu de moyens à focaliser leur activité sur la recherche d’hébergements, d’aliments, de soins, d’aides juridiques…
Cette situation structure leurs rôles dans les relations avec les quêteuses d’asile et ouvre une piste de réponse à une autre question : Que se passe-t-il quand les militantes qui luttent pour la « libération des femmes », rencon-trent les femmes clandestines venant d’ailleurs ? « Tu trouves, tu transmets,
31. Extrait d’entretien avec I. C, fait à Nice, le 04.04.2019.
32. Extrait d’entretien avec A. T, fait à Menton, le 16.04.2019.
tu aides à écrire la requête, tu accompagnes… Avec une, ensuite avec l’autre… On sert de service social pour ces femmes »33.
Le travail du service social se répète et structure des relations de domi-nation entre victimes et solidaires. Dans les groupes féministes trans-frontaliers, leur expérience de solidarité crée des réflexions et débats qui s’intensifient depuis 2018. Nous avons assisté à plusieurs débats féministes, dans la région, en Italie et en France : lieux d’échanges de méthode pour dépasser la situation de domination imposée par le contexte ou bien pour « agir auprès des femmes étrangères sans nourrir le paternalisme européen ni l’ethnicisation du sexisme » ou encore pour « inventer des tactiques pour trouver l’équilibre entre la mobilisation politique et la solidarité »34. Sur ce dernier point, les témoignages des militantes féministes révèlent la réflex-ion collective sur la questréflex-ion du travail social. Notons que deux autres questions sont également exprimées dans ces débats et témoignages : Quelle est la place des groupes féministes dans la construction des schémas d’accueil ? Que font ces groupes pour apporter dans l’espace public cette question spécifique ? Nous avons vu que nos enquêtées se posent les mêmes questions, surtout depuis 2018. Une des réponses consiste à expli-quer comment le travail caritatif écrase ces organisations qui ne trouvent plus ni disponibilité ni ressource pour des actions politiques. Et c’est autour de ce questionnement que le GRAF, constitué en 2016 avec une « priorité donnée à la solidarité avec les femmes en migration », a arrêté ce travail de solidarité au bout d’un an, pour ne pas être « accaparées par le travail social et pour organiser des actions politiques »35.
Ces débats ont donné lieu, depuis 2018, à une orientation vers des ac-tions autour de revendicaac-tions féministes, à Nice : par exemple lors d’une campagne politique organisée de mars 2018 à mars 2019, par le GRAF, en mobilisant d’autres associations généralistes comme la Cimade, Habitat &
Citoyenneté ou la LDH. Suite aux tables rondes télévisées et diffusées et aux actions de rue médiatisées, la situation et les revendications des quêteuses d’asile sont rendues relativement visibles puisqu’elles sont appa-rues et discutées, durant plus qu’un mois, dans les médias locaux. Sans aucun effet sur les politiques des pouvoirs publics, cette campagne a ren-forcé une sensibilisation sur cette question dans l’espace des luttes sociales de la région.
Si ce processus remonte à seulement six ans, délai insuffisant pour es-timer les effets sur le devenir des quêteuses d’asile, jusqu’à présent, elles ne
33. Extrait d’entretien avec G. T, fait à Nice, le 02.04.2019.
34. Notes prises durant l’observation participante à la « Rencontre européenne, «Femmes, Migration, Refuge», à Genève, les 27 - 28 - 29 septembre 2019.
35. Extrait d’entretien avec Ayça C, militante du GRAF fait à Nice, du 24 au 26 mars 2019.
sont que des objets de ces revendications, pas les sujets qui les portent.
Leurs visages, leurs voix n’apparaissent pas dans l’espace public. Si elles réussissent relativement, par de multiples stratégies, à être actrices de leur aventure, l’insécurité administrative impose l’invisibilité aux femmes étrangères criminalisées. Par ailleurs, leurs conditions de vie façonnées par le manque d’hébergement et les carences face à leurs besoins essentiels, en-travent fortement leur disponibilité pour des relations, des échanges, de l’engagement. Les militantes féministes solidaires soulignent aussi la fai-blesse criante des dispositifs de participation des demandeuses d’asile, en affirmant en général une vision qui insiste sur la capacité des migrantes à être actrices à part entière. « C’est normal ; elles font ce qu’elles peuvent.
Nos conditions de vie sont différentes, pour lutter ensemble, il faut du temps »36 insiste Nathalie H, militante du GRAF. Quant à Sabina, féministe italienne, elle n’attend pas leur participation ni aujourd’hui ni demain :
« Nous ne sommes pas obligées de devenir amies. C’est normal que nous, les féministes européennes, soyons solidaires avec les femmes étrangères contre les violences des Etats européens. Nous ne pouvons pas attendre qu’elles participent à nos actions parce qu’on les a aidées ! Elles sont déjà en lutte dans leurs vies. Et après, elles choisiront comment continuer»37.
Le communiqué du GRAF, publié vers la fin de 2019, annonce égale-ment cette vision et reflète un murisseégale-ment d’une réflexion entre les mili-tantes féministes, dans la région : « C’est à nous de contester les politiques de notre pays, les demandeuses d’asile sont les premières victimes de ces politiques mais nous sommes concernées aussi »38.
2.3. Transformations : le temps long du changement
C’est à partir de ce constat que s’organise, pour le 5 juin 2021, à Nice, l’action féministe transnationale Toutes Aux Frontières39, contre les poli-tiques européennes de criminalisation des migrations. Au moment de la ré-daction du présent article, elle est en cours d’organisation et la crise sani-taire met un grand point d’interrogation sur la faisabilité d’une action mas-sive comme prévu, néanmoins le processus de son organisation révèle
36. Extrait d’entretien avec Nathalie H., militante du GRAF, fait à Nice, le 20.02 2019.
37. Extrait d’entretien avec Sabina N, militante féministe autonome en Italie, fait à Imperia, le 21 03 2019.
38. Communiqué du GRAF intitulée « Pas à notre nom ! Non à la criminalisation des migrations ! », 09. 10 2019.
39. Toutes aux frontières | Rencontres Internationales Féministes à Nice, le 5 juin 2021 (wordpress.com).
l’ouverture des frontières des mobilisations féministes dans la région trans-frontalière, au niveau des revendications mais aussi au niveau organisation-nel.
L’action Toutes Aux Frontières a germé en juillet 2019 lors d’une réu-nion, à Vintimille, entre des groupes féministes de Nice, Vintimille, Impe-ria et de Genova, avec l’idée d’une occupation des frontières. En septembre 2019, elles profitent d’une rencontre à Genève « Femmes, migrations, ref-uges », pour partager leurs propositions avec les autres féministes venues de multiples pays de l’Europe et à la fin de cette rencontre, elles réussissent à créer, avec une dizaine de militantes belges, suisses, françaises, une coor-dination pour organiser les voyages en octobre 2020 vers la frontière Vin-timille-Menton où se déroulerait une action d’occupation de trois jours. Les comptes rendus de plusieurs dizaines de réunions de septembre 2019 à mars 2020 témoignent à la fois d’une discussion collective où se cristallisent les revendications mais aussi de la mise en réseau, autour de l’action contre les frontières. Dans la même période, cette coordination s’est structurée à partir de nouveaux comités locaux, surtout en Italie et en France. L’action qui était prévue en octobre 2020 a été reportée au 5 juin 2021 et s’est trans-formée en une marche massive à Nice, du fait de la crise sanitaire actuelle qui se traduit par des confinements dans plusieurs pays européens et surtout par une militarisation répressive de la zone frontalière franco-italienne où l’action devait initialement avoir lieu. C’est dans ces conditions confuses et imprévisibles que l’Assemblée PACA-Ligurie de Toutes Aux Frontières émerge, en réunissant des collectifs féministes et des militantes d’organisations d’aide aux migrant.es de plusieurs villes des deux côtés de la frontière (Marseille, Grasse, Nice, Forcalquier, Menton, Roya, Vinti-mille, Imperia, Genova). En créant des groupes de travail (manifestation, événements artistique, communication, financement, hébergement), elle fait appel aux mouvements féministes et à des organisations se définissant sol-idaires-progressistes. C’est le cas du Planning familial, Non Una di Meno, la Cimade qui ont mobilisé leurs organisations nationales à partir de leurs sections dans la région.
Nous, féministes habitantes de l’Europe, de toutes les conditions sociales et de tous les âges, quelles que soient nos provenances, nos choix, nos mondes… nous élevons nos voix pour dire Non ! (…) Ces politiques ne peuvent être menées en notre nom ! Nous ne voulons plus de vos murailles qui nous entourent ! Pas en notre nom ! Parce que, comme disait Virginia Wolf, femme de lettre féministe « En tant que femme je n’ai pas de pays.
En tant que femme je ne désire aucun pays. Mon pays à moi, femme, c’est le monde entier ». Parce que les frontières politiques sont une construction virile et militariste, issues des guerres, des violences, des morts. Pour
rom-pre avec cette histoire militariste et patriarcale, nous organisons, le 5 juin 2021, une grande action féministe transnationale à Nice, ville stratégique pour la gestion de la frontière Vintimille-Menton. Dans ce lieu symbolique, nous, féministes de tous les pays européens, manifesterons ensemble car les politiques migratoires se font à l’échelle européenne : c’est aussi à cette échelle que nous ripostons.
Comme cet extrait de communiqué, nous suivons la circulation visible des informations pour cette action, notamment à partir d’octobre 2020, dans de nombreux cercles, réseaux, organisations. Depuis cette période, les réu-nions de chaque groupe de travail, de l’Assemblée, des coordinations inter-comités sont périodiques et par le site internet, par les documents partagés et d’autres moyens numériques, facilitent le fonctionnement fluide et per-mettent la participation de nouvelles personnes et groupes. Le cerf-volant a été choisi comme le symbole de l’action : les collectifs organisent des atel-iers de rues, dans plusieurs villes, pour préparer collectivement des cerfs-volants. La participation importante des artistes féministes italiennes et françaises permet d’enrichir les visuels de l’action qui sont mis à disposi-tion pour utilisadisposi-tion libre, sur le site internet.
L’étude de la préparation de cette action apporte plusieurs éléments de réponses au questionnement sur la mise en exergue, dans l’arène publique, de situations spécifiques aux quêteuses d’asile et sur la place des groupes féministes dans la construction des schémas d’accueil. Si la médiatisation de la campagne menée par le GRAF en 2018 était déjà le signe d’une visi-bilité relative des revendications par rapport à la migration féminine, elle était insuffisante pour parler de sa mise sur agenda politique. Mais c’est sur l’agenda militant que nous observons une modification visible. Jusqu’alors caractérisé par la vision universaliste, cet agenda militant franco-italien ne reflétait guère la problématisation de la question des rapports sociaux de genre durant la migration. De ce fait, les quêteuses d’asile et leurs prob-lèmes spécifiques y étaient invisibles. C’est moins le cas aujourd’hui à par-tir de l’engagement de quatre organisations généralistes40 à la campagne de 2018 initié par le GRAF et surtout à partir de la participation de la totalité des organisations solidaires-généralistes de PACA et de Ligurie à l’Assemblée féministe ToutesAuxFrontières. Celle-ci, initiée par des groupes autonomes féministes, peut être considérée comme un signe de changement de posture.
40. La CIMADE, l’Habitat & Citoyenneté, l’ADN, LDH.
Conclusion
Nous avons vu comment plusieurs groupes féministes franco-italiens s’impliquant dans les mouvements de solidarité avec les personnes mi-grantes dans cette zone transfrontalière, se sont regroupés, depuis 2016, autour des mêmes critiques et d’un travail de solidarité spécifique envers les quêteuses d’asile. La continuité de cette coopération transfrontalière,
Nous avons vu comment plusieurs groupes féministes franco-italiens s’impliquant dans les mouvements de solidarité avec les personnes mi-grantes dans cette zone transfrontalière, se sont regroupés, depuis 2016, autour des mêmes critiques et d’un travail de solidarité spécifique envers les quêteuses d’asile. La continuité de cette coopération transfrontalière,